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Wednesday, May 25, 2011
L'ITALIE OU L'IDÉAL PERVERTI
Longtemps les cités italiennes furent des modèles.
Sur le plan politique avec la notion d'urbs, qui au même titre que la civitas, est l'un des piliers fondateur de la culture européenne.
Sur le plan esthétique avec une architecture et un urbanisme qui font de Venise, Padoue, Génes, Amalfi, Positano, Sienne et Rome probablement les plus belles villes du monde. Ou en tout cas parmi les plus belles ...
Voilà en tout cas ce que moi j'ai retenu de mes lointaines études classiques (plusieurs années de latin grec, notamment), de quelques lectures et d'un certain nombre d'escapades italiennes.
Et même si j'ai toujours su que l'histoire ne pouvait évidement se résumer à quelques concepts et bâtiments, la notion de cité italienne a toujours eu dans mon esprit une consonance un peu particulière.
Aujourd'hui ma question est : cette longue histoire politique et esthétique est-elle en train de servir de base à la négation de cet idéal de mixité et d'échange ? ou - dit autrement - l'image de la cité italienne va-t-elle fournir les décors à une nouvelle ségrégation ?
La question m'est venue il y a quelques semaines à Johannesburg où - par des hasards de réservation d'hôtel - je me suis retrouvé à Montecasino, fausse cité italienne dédié au shopping et aux jeux.
Un centre d'un nouveau genre - multi-fonctions (commerces, bureaux hôtels ...) et majoritairement à ciel ouvert - comme on en trouve de plus en plus aux Etats-Unis et qui sont destinés à offrir un semblant d'urbanité à l'européenne, ou en tout cas correspondant à l'idée que s'en font les non-européens (Voir la version indienne, là).
A noter que si à Montecasino les parties extérieures sont particulièrement réussies, les galeries intérieures sont, elles, très kitsh et très similaires à celles du Forum Shop du Caesar Palace de Las Vegas ou à celles du Venus Forte de Tokyo.
Ce centre a la particularité d'être un des rares endroits à Johannesburg où l'on peut sortir de sa voiture pour marcher et - encore plus fort - se promener le soir ou dîner à une terrasse. On se sent donc bien et libre ... même si l'on est en réalité dans un immense cage gardée par de nombreux vigiles.
Sauf qu'évidement dans l'ancien pays de l'apartheid ce genre d'enclave a forcément un drôle de goût. Surtout quand on constate que tous les vigiles sont noirs, et les clients blancs.
Parmi les nombreuses réflexions qui m'ont assailli en découvrant Montecasino, je voulais vous en proposer deux sous formes de questions
De la ville privée à la privatisation de Rome ?
Si la ville italienne devient le modèle de la ville privée, pourquoi ne pas imaginer à l'inverse que les zones centrales de Rome ou de Venise soient privatisées afin d'être transformées en une vaste entité d'un nouveau genre associant musée et commerces, et dont l'accès serait étroitement contrôlé ?
C'est en tout cas une hypothèse par très éloignée de celle proposée récemment par le magasine San Rocco à la suite des déclaration du ministre de l'intérieur italien d'interdire toutes les manifestations dans les zones touristiques des villes de la péninsule.
Les images proposées ci-dessous pour Rome et Venise sont en tout cas très fortes et prennent une vraie résonance politique quand on les compare à celles venant d'Afrique du sud. Ou quand lMontecasino semble donner de la crédibilité à une idée a priori totalement irréalisable et contraire à la culture européenne. La Plazza del popolo n'aurait alors de populaire plus que le nom.
De la fausse ville italienne à Manhattan comme centre commercial néo-vénitien ?
Si la galerie marchande décorée à l'italienne devient la référence urbaine et architecturale, pourquoi ne pas imaginer de transformer Manhattan en une Venise commerciale ?
C'est là encore une hypothèse pas très éloignée de celle proposée par Zuccaro Marchi, un étudiant en archi avec son projet "Bauci Outlet Mall City".
Voilà comment Z. Marchi présente son projet. Une fiction, que l'on peut lire évidement en regardant les photos de Montecasino.
The New York Times, Tuesday February 8, 2035 «2035...finally our Generation lost. Sustainability was considered a joke and now we have no more opportunities to live as our Fathers did. No more Fresh air, no more sane food....Cities sunk and the Solar light has become dangerous instead than helpful.
Traditionalism, the loss of trust on progress, finally has become the most powerful Religion in XXI Century Architecture, a dangerous religion for our souls which have turned our contemporary cities in a old William Blake tale. Thus in Berlin the Smithsons Hauptstadt has been totally destroyed, in London the built Exodus of R. Koolhaas has become a platform for single houses farms, Tange Tokyo Bay and Kurokawa Helix City have been transformed in small Italian style towns,.... Finally Architects focused their attention on Manhattan, New York. It was decided to demolish the Continuous Monument designed by Superstudio Group in 1969 and to reuse a part of its Superstructure in order to build a second level city, more traditionalist, more liveable, to be designed in the right human scale.
No ideas came out from the most important architecture firms, no ones. In a NY municipality reunion, out of the blue, an Outlet contractor who worked in Disney raised his hand: '' Why don''t we build again Venice as they already did more than 100 years ago in Coney Island? The real Venice is already sunk....we may all live in the Doge city, which was my wife dream, and get all millions of tourists who usually visited it.''
Already other cities attempted to use Venice image, but only New York now has the copyrights. Indeed a new Venice is now over our heads, with the same size of the old one.
Its new name is Bauci as one of the Invisible Cities narrated by the Italian writer Italo Calvino. Should our future be safe now with a new Invisible City?....»
Sur ce sujet, voir là, là et là.