Architecture, Mobilité, Nomadisme, Urbanisme, Nouveaux Imaginaires urbains, Nouvelles Fictions, Prospective, Nouveaux imaginaires du corps, Nouveaux imaginaires du sport
Friday, December 31, 2010
QUAND LES NARCOS REVEILLENT L'IDEAL DE LA BATMOBILE
Il y a quelques années, dans le cadre de Fiction Cities et des réflexions sur le thème Fiction/Not fiction, j'avais essayé de mieux comprendre la façon dont certains films portaient de façon très forte les imaginaires automobiles dans différents pays.
J'avais, bien évidement, retenu dans ma sélection de films, les différentes séries, y compris télé, des Batman afin d'analyser l'évolution des formes de la Batmobile, dont l'histoire est particulièrement riche - voir le très complet site Batmobile history.
En trois slides - voir ci-dessus - j'avais notamment voulu montrer comment les attentats du 11 septembre - et la grande parano américaine qui s'en était suivie - avaient totalement modifié la façon de penser ce véhicule, et comment la Batmobile était devenue, en 2005 dans "Batman Begins", un vulgaire un Super Humvee de l'US Army. D'une voiture de conquérant avec les ailes déployées, on était passé à une voiture de trouillard replié sur lui même. Pas franchement glorieux, mais révélateur de l'état d'esprit des américains à l'époque, dont l'idéal automobile était le Hummer.
On pouvait légitimement penser que cet idéal automobile avait sérieusement décliné depuis quelques années, comme l'avait d'ailleurs symbolisé en 2009 la vente par General Motors de la marque Hummer au groupe chinois Sichuan Tengzhong Heavy Industrial Machinery.
Mais c'était oublier que si un Occident riche et pacifié rêve dorénavant de voitures toujours plus petites et écolos, certaines parties du monde sombraient, elles, dans la violence et faisaient de la voiture blindée un véritable idéal automobile (voir Bullet Proof).
Aujourd'hui le marché de la voiture blindée est en pleine expansion "Annual sales of armored vehicles now form a luxury niche in the global car market worth roughly $4.4 billion for carmakers, said Peter Schmidt, managing director of Automotive Industry Data, a Warwick, England-based consultancy. That does not include the many smaller specialist companies providing armoring services", peut-on ainsi lire dans l'excellente enquête "DaimlerChrysler, VW, BMW, Ford Sell Armored Cars at Record Rate"
Et c'est, sans véritable surprise, qu'on apprend toujours dans ce même article que "Latin America, including Central America and Mexico, accounts for about half the carmakers' global market for armored vehicles, according to an internal Ford market study provided by Vaughn. The region is also the fastest-growing market, along with the Middle East, with a 7 percent share, and Asia, with 2 percent. Western and Eastern Europe account for 17 percent and 13 percent respectively, Ford estimated. The U.S. has only 2 percent of the market and Africa has 3 percent."
Dans un pays comme le Mexique, la montée en puissance des narcos, qui roulent tous dans ces engins, la lutte particulièrement meurtrière contre ces mêmes narcos (plus de 10 000 morts en 4 ans !!!) et l'incroyable expansion de l'industrie du kidnapping ( 4 enlèvements sont dénoncés à la police en moyenne chaque jour depuis le début de l’année 2010, en sachant que seuls 25% des kidnappings sont déclarés par crainte de représailles !! ), expliquent très largement cette croissance du marché de la voiture blindée qui dépasserait aujourd'hui les 80 millions de dollars annuellement.
Voir, pour plus de détails, "Mexico’s Armored Car Market Now Worth $80 Million Annually", dans lequel on peut lire, notamment, "Volkswagen offering an armored Jetta for the still-expensive amount of $70,000", qui indique que ce marché de la sécurité touche tous les segments.
Et pour donner corps à ce phénomène, je vous propose ces quelques images tirées du reportage Mexican Armor Industry, et vous incite à regarder l'instructive vidéo Mexico Violence a Boon to Armored Car Industry.
Ce post fait bien évidement le lien entre mes différents posts sur la violence en Amérique latine, le poids des narcos dans ces pays (là et là), mais aussi la montée en puissance de la pauvreté et des inégalités dans cette région (là et là) et le rôle des super-héros (là).
Thursday, December 30, 2010
NARCOS BLOQUEOS, ou LE BLOCAGE EXPRESS D'UNE VILLE
Dans le cadre de mes réflexions sur les façons dont l'économie de la drogue influence l'urbanisme latino-américain (voir là, là et là), je n'avais jamais vraiment réfléchi à la façon dont les narcos tentaient ou non de contrôler la mobilité urbaine d'une ville entière. Pour moi, leur volonté de contrôle se limiter à interdire l'accès de la police à certaines zones, et notamment à certaines favelas au Brésil. Et bien, c'était une grossière erreur de ma part.
En effet, les narcos mexicains viennent d'inventer à Monterrey, agglomération de plus d'un million d'habitants située au Nord-Est du Mexique, une nouvelle technique, le narcos bloqueos. Une technique appliquée par les petites mains du cartel Los Zetas, et qui consiste à s'emparer de camions ou de voitures pour bloquer en quelques minutes les grands axes de la cité. Il s'agit pour eux de punir une ville dans son entier suite, en général, à un raid de l'armée contre leur business.
Voilà comment El Mondo expliquait récemment dans "Narcobloqueos, la última estrategia de los cárteles mexicanos", la technique et l'ambition des narcos avec ce type d'action.
Poumon économique et industriel du Mexique, Monterrey n'a pas encore été réellement affecté par ces actions, mais il probable que cette guerilla circulatoire donnera des idées à d'autres dans la façon de déstabiliser pour une raison ou une autre (lutte sociale, grande criminalité ... ) une ville, ou en tout cas ses grands axes de circulation. Les narcos bloqueos sont, en quelque sorte, la version flash mob des opérations escargot des routiers français.
En effet, les narcos mexicains viennent d'inventer à Monterrey, agglomération de plus d'un million d'habitants située au Nord-Est du Mexique, une nouvelle technique, le narcos bloqueos. Une technique appliquée par les petites mains du cartel Los Zetas, et qui consiste à s'emparer de camions ou de voitures pour bloquer en quelques minutes les grands axes de la cité. Il s'agit pour eux de punir une ville dans son entier suite, en général, à un raid de l'armée contre leur business.
Voilà comment El Mondo expliquait récemment dans "Narcobloqueos, la última estrategia de los cárteles mexicanos", la technique et l'ambition des narcos avec ce type d'action.
"En medio de la guerra entre cárteles que viven los estados fronterizos de Nuevo León y Tamaulipas, en los últimos días bandas de delincuentes han utilizado automóviles, tráilers y autobuses de pasajeros para entorpecer el tráfico en lo que el gobierno mexicano considera "una reacción desesperada de las bandas criminales" ante la presión del Ejército.Voir une vidéo là, avec la très courageuse fuite d'une patrouille de la police, un corps traditionnellement totalement corrompu dans ce pays, et qui, depuis plusieurs années, préfère composer avec les narcos que lutter contre. Ce qui explique que la bataille contre les cartels soit actuellement menée par l'armée, et non plus par la police.
Son acciones para "distraer la atención y dispersar la vigilancia, aprovechando lo sorpresivo de sus acciones". La delincuencia organizada ha logrado cerrar autopistas, calles y carreteras de la ciudad atravesando en algún caso "hasta 41 vehículos" en una misma ruta, explicó Luis Carlos Treviño, encargado de la Seguridad en el Estado de Nuevo León.
Para ello los narcotraficantes se sirven de jóvenes pandilleros, quienes, con acciones equiparables a las de las guerrillas urbanas, roban autos, secuestran tráilers o autobuses del transporte público, y cortan con ellos las vías de circulación."
Poumon économique et industriel du Mexique, Monterrey n'a pas encore été réellement affecté par ces actions, mais il probable que cette guerilla circulatoire donnera des idées à d'autres dans la façon de déstabiliser pour une raison ou une autre (lutte sociale, grande criminalité ... ) une ville, ou en tout cas ses grands axes de circulation. Les narcos bloqueos sont, en quelque sorte, la version flash mob des opérations escargot des routiers français.
Wednesday, December 29, 2010
ROCINHA, POSITANO, SAN FRANCISCO, ou LES FAVELAS FUTURS TERRITOIRES DES BOBOS ?
Rapprocher des images peut parfois se révéler périlleux, mais aussi diablement stimulant. C'est en tout cas ce que j'ai tenté de faire en mettant en résonance ces trois photos de trois contextes urbains radicalement différents, et qui - pourtant - semblent se répondre.
La photo du haut montre Rocinha, l'une des plus grande favela de Rio de Janeiro.
La photo du milieu montre Positano, l'une des villes les plus touristique de la superbe côte amalfitaine, dans le sud de l'Italie.
La troisième montre un des quartiers les plus huppés de San Francisco.
Quand on regarde ces trois photos ensemble, on peut y voir un rapprochement amusant, mais à la limite obscène.
Mais on peut aussi y voir un scénario urbain pour les décennies qui viennent. Scénario dans lequel les favelas deviendraient les futurs quartiers branchés de Rio. Les exemples de ce genre de gentrification ne sont pas rares dans le monde entier, y compris à Rio, où, par exemple, l'ancien quartier bohème de Santa Teresa est peu à peu réinvesti par les bobos, après des années de déclin et d'abandon.
Alors, évidement, on n'est pas obligé de croire ou de souhaiter ce genre d'évolution pour les favelas ( où iront les pauvres, si les bobos s'installent dans les favelas donnant sur la mer ? ), reste que l'hypothèse est loin d'être inintéressante en terme de prospective urbaine, ni totalement aberrante si on pense aux nouveaux imaginaires urbains qui agitent certains coins de la planète. La favela n'est-elle pas le prototype de la ville compacte et sans voiture dont rêvent les riches occidentaux ?
Pour continuer à réfléchir sur ce sujet, voir là ou là.
PS / Et pour aller dans le sens de mon hypothèse, je ne résiste pas à vous proposer ci-dessous la couverture de la revue brésilienne d'architecture et d'urbanisme aU, du mois de novembre dernier. Moi, j'y vois autant Positano que Rocinha !
Tuesday, December 28, 2010
HANGAR FLOTTANT
Pour faire suite à mon précédent post sur la ligne des nouveaux paquebots, je voulais vous proposer cette photo d'un transporteur de véhicules. C'est probablement la catégorie de bateaux la plus inélégante qui existe, avec leur look de hangars flottants, mais - semble-t-il - terriblement efficace.
"Depuis le début des années 1970, les importations et exportations de véhicules ont très fortement progressé et de nouveaux types de navire capables de transporter des véhicules sont apparus. Il s'agissait au départ de navires rouliers. En 1973, la compagnie maritime japonaise K Line construisit le European Highway, le premier pur transporteur de voitures qui pouvait embarquer 4 200 automobiles.
Aujourd'hui, les transporteurs de voitures et leurs proches cousins, les transporteurs mixtes voiture/camion sont devenus une classe à part de navires. On les distingue facilement par leur structure très carrée et entièrement fermée, sorte de grosse boite d'acier couvrant toute la longueur et la largeur de la coque (fardage important) avec de grosses rampes repliables à l'arrière et sur le côté du navire.
Les transporteurs de véhicules mixtes voitures/camions possèdent certains ponts mobiles permettant d'adapter la hauteur entre les ponts à la hauteur des véhicules transportés. Ainsi, un navire de 6 500 unités voitures peut avoir 3 de ses douze ponts dont la hauteur peut varier de 1,7 mètre (hauteur standard des berlines) à 6,7 mètres pour embarquer des camions mais supprimant alors l'usage d'un des ponts.
La capacité des grands navires transporteurs de véhicules actuels utilisés en trafic transcontinental s'élève jusqu'à 6 400 voitures. Une grande partie de cette flotte de navires dépasse les 200 mètres de long et les 30 mètres de large. Quelques navires dépassent désormais les 250 mètres de long (classe Tamesis) et le plus grand transporteur actuel, le MV Mignon, de la compagnie suédo-norvégienne Wallenius-Wilhelmsen, peut embarquer plus de 7 200 voitures. Il existe des projets de transporteurs de plus de 270 mètres de long avec une capacité de plus de 8 500 véhicules pour la fin des années 2000." (source : wikipedia)
Sur d'autres monstres marins, voir C'est quoi un chantier en 2 100 ?
TOUJOURS MARIN ?
En regardant la nuit les paquebots de croisière dans la baie de Rio, je me demande si ceux-ci ont encore quelque chose de marin, tant leurs formes relèvent plus de la copie d'une Cité radieuse du Corbu, que des lignes tendues des liners d'antan. Quand à leur organisation intérieure, elle n'est qu'un vulgaire mix de la gated communities et du shopping mall (voir, New floating cities.)
"Dans ces espaces artificiels, il y a une forte absence de vie, aucune évolution organique. Les gens passent leur temps à le tuer et à manger. Ils sont très loin de l'idée première de voyage, qui consiste en une exploration, une expérience" explique le plasticien belge Hans Op de Beeck pour présenter son installation/exposition "Sea of tranquility", dont les photos ci-dessus et dessous sont extraites. On est, là, très loin des riantes brochures publicitaires des croisiéristes, mais sans doute plus près de la réalité.
Sunday, December 26, 2010
SAO PAULO, A NOVA GOTHAM CITY ?
Certaines villes sont tellement sombres, violentes, laides, dépourvues de tout urbanisme qu'elles semblent presque renvoyer à la fiction. Pour moi, Sao Paulo, fait partie de celles-ci. Circuler la nuit dans cette mégapole, c'est circuler dans la Gotham City du prochain Batman.
Pour moi, Sao Paulo est certainement la Gotham du XXI° siècle, tant par son bouillonnement, ses inégalités, sa violence, que par sa police corrompue, ses gangs, mais aussi - et surtout - son urbanisme verticale et dense. La ville permettrait, sans aucun doute, de revivifier le mythe de cette ville fiction, dont les références à New-York ne correspondent plus à grand chose aujourd'hui. Cela fait longtemps que la Grosse pomme s'est aseptisée et sécurisée, et qu'elle ne porte plus les sombres menaces qu'elle était censée incarner dans les comics.
L'un de ceux qui a le mieux rendu compte par son travail de ces liens possibles entre le NY du début du XX° et le Sampa du XXI°, même si cela n'était sans doute pas son intention de départ, est certainement le photographe paulista Cássio Vasconcellos, notamment avec sa série Noturnos, dont les photos ci-dessus sont extraites.
Et comme pour confirmer mon sentiment, je ne peux que vous renvoyer vers Super X, installation réalisée par la plasticienne Regina Silveira en 1997 sur les murs des tours de Sao Paulo. Un super héros totalement imaginaire, mais qui par sa présence fugace sur les façades, montrait combien seul justicier très improbable serait capable de lutter tant contre la violence que contre les inégalités. Un peu comme Batman au milieu du XX° siècle à New-York !
Pour moi, Sao Paulo est certainement la Gotham du XXI° siècle, tant par son bouillonnement, ses inégalités, sa violence, que par sa police corrompue, ses gangs, mais aussi - et surtout - son urbanisme verticale et dense. La ville permettrait, sans aucun doute, de revivifier le mythe de cette ville fiction, dont les références à New-York ne correspondent plus à grand chose aujourd'hui. Cela fait longtemps que la Grosse pomme s'est aseptisée et sécurisée, et qu'elle ne porte plus les sombres menaces qu'elle était censée incarner dans les comics.
L'un de ceux qui a le mieux rendu compte par son travail de ces liens possibles entre le NY du début du XX° et le Sampa du XXI°, même si cela n'était sans doute pas son intention de départ, est certainement le photographe paulista Cássio Vasconcellos, notamment avec sa série Noturnos, dont les photos ci-dessus sont extraites.
Et comme pour confirmer mon sentiment, je ne peux que vous renvoyer vers Super X, installation réalisée par la plasticienne Regina Silveira en 1997 sur les murs des tours de Sao Paulo. Un super héros totalement imaginaire, mais qui par sa présence fugace sur les façades, montrait combien seul justicier très improbable serait capable de lutter tant contre la violence que contre les inégalités. Un peu comme Batman au milieu du XX° siècle à New-York !
Friday, December 24, 2010
SAO PAULO
Parfois certaines villes vous apparaissent tellement inégales et injustes, que l'on se demande comment elles fonctionnent encore. C'est en tout cas le sentiment qui m'envahit ici à Sao Paulo, et plus particulièrement en ce jour de Noël après avoir parcouru les plus chics des centres commerciaux, les riches et très agréables rues marchandes de Jardim, près de Paulista, mais aussi vu du taxi ou du métro des quartiers d'une telle pauvreté que l'on comprend mieux le quadrillage de la ville par toutes sortes de polices et d'entreprises de sécurité.
Alors pour marquer le coup, je voulais juste vous proposer ci-dessus une photo aérienne (qui rappelle très directement celle-ci et celle-ci) et ci-dessous, cette carte sur l'inégalité dans le monde (tirée du doc passionnant Urban Age South America)
Et ci-dessous le chaos urbain du centre de Sao Paulo.
Wednesday, December 22, 2010
LES FAVELAS COMME TERRAINS DE JEUX
En analysant dans un post datant de juin 2009, le cultissime "Grand Theft Auto 4", je m'étais demandé si le fait d'être un tueur permettait de mieux naviguer dans la ville ?.
Et je vais vous avouer que c'est un peu la même question que je me pose ici à Rio en essayant de mieux de comprendre l'organisation et l'économie des favelas (voir là). Pour un observateur extérieur, le système est tellement mystérieux que seul les oeuvres de fiction, et notamment des films comme "Cidade de Deus" ou "Tropa de elite" permettent d'approcher de plus ou moins près la réalité de la violence qui s'y déploient et des réseaux de narco-trafiquants qui les contrôlent.
Et même s'il est hors de question de réduire la vie de ces bidons-villes à cette seule violence, force est de reconnaître que c'est l'image que nous en avons. Et cette perception est encore accentué depuis plusieurs années avec certains jeux vidéo, comme "Mercenaries 2", ou plus récemment, "Call of Duty - Modern of Warfare 2", dont plusieurs missions se passent les favelas de Rio (voir images ci-dessus), confirmant ainsi le statut de ferral city que les américains donnent à ces morceaux de villes depuis quelques années (voir là). Et malgré tous leurs défauts - notamment idéologiques - ces jeux permettent d'avoir une image assez juste de toute le système de ruelles qui irriguent les dizaines de milliers d'habitations de ces villes verticales (voir là la réalité, et là une vidéo du jeu).
Mais cette idée de faire des favelas de nouveaux terrains de jeu pour gamers, se retrouvre aussi, mais de façon beaucoup plus littérale, avec le foot, autre symbole par excellence du Brésil.
Prenant acte que pour beaucoup de jeunes le sport se passe surtout en dehors des stades traditionnels et des clubs officiels, des jeux comme Fifa Street offrent une multiplicité de terrains de foot informels, dont bien évidement ceux des favelas. Des terrains qui, ici au Brésil, ont une vraie signification sociale, puisqu'ils apparaissent pour beaucoup comme un moyen de sortir de la pauvreté (voir là).
Mais des terrains qui ont aussi la particularité d'avoir des formes étonnantes, comme le montre la série O Campo du photographe Joachim Schmid.
On retrouve là l'idée que les villes se transforment peu à peu en stade. Idée qu'une marque comme Nike a très largement banalisée via son marketing particulièrement malin, car en phase avec les nouvelles pratiques sportives et, surtout, les nouveaux imaginaires urbains (voir là et là).
Et je vais vous avouer que c'est un peu la même question que je me pose ici à Rio en essayant de mieux de comprendre l'organisation et l'économie des favelas (voir là). Pour un observateur extérieur, le système est tellement mystérieux que seul les oeuvres de fiction, et notamment des films comme "Cidade de Deus" ou "Tropa de elite" permettent d'approcher de plus ou moins près la réalité de la violence qui s'y déploient et des réseaux de narco-trafiquants qui les contrôlent.
Et même s'il est hors de question de réduire la vie de ces bidons-villes à cette seule violence, force est de reconnaître que c'est l'image que nous en avons. Et cette perception est encore accentué depuis plusieurs années avec certains jeux vidéo, comme "Mercenaries 2", ou plus récemment, "Call of Duty - Modern of Warfare 2", dont plusieurs missions se passent les favelas de Rio (voir images ci-dessus), confirmant ainsi le statut de ferral city que les américains donnent à ces morceaux de villes depuis quelques années (voir là). Et malgré tous leurs défauts - notamment idéologiques - ces jeux permettent d'avoir une image assez juste de toute le système de ruelles qui irriguent les dizaines de milliers d'habitations de ces villes verticales (voir là la réalité, et là une vidéo du jeu).
Mais cette idée de faire des favelas de nouveaux terrains de jeu pour gamers, se retrouvre aussi, mais de façon beaucoup plus littérale, avec le foot, autre symbole par excellence du Brésil.
Prenant acte que pour beaucoup de jeunes le sport se passe surtout en dehors des stades traditionnels et des clubs officiels, des jeux comme Fifa Street offrent une multiplicité de terrains de foot informels, dont bien évidement ceux des favelas. Des terrains qui, ici au Brésil, ont une vraie signification sociale, puisqu'ils apparaissent pour beaucoup comme un moyen de sortir de la pauvreté (voir là).
Mais des terrains qui ont aussi la particularité d'avoir des formes étonnantes, comme le montre la série O Campo du photographe Joachim Schmid.
On retrouve là l'idée que les villes se transforment peu à peu en stade. Idée qu'une marque comme Nike a très largement banalisée via son marketing particulièrement malin, car en phase avec les nouvelles pratiques sportives et, surtout, les nouveaux imaginaires urbains (voir là et là).
Sunday, December 19, 2010
FAVELAS, OU QUAND L'ÉCONOMIE DES MILICES COMPLETE CELLE DES NARCOS
Ici à Rio de Janeiro, la fiction se brouille depuis quelques semaines avec la réalité. Alors que Tropa de Elite 2 (images ci-dessus) cartonne au box office brésilien avec près de 11 millions d'entrées, fin novembre ces mêmes troupes d'élites - dites BOPE pour Batalhão de Operações Policiais Especiais - faisaient l'actualité en s'attaquant à quelques groupes de narcos dans les favelas au nord de la ville (voir là et là). Comme si les chefs de la police voulaient démontrer que la lutte engagée depuis près d'un an contre la corruption dans le corps de la police militaire de Rio, dont sont issues ces troupes d'élites, avait déjà porté ses fruits. Et que cette même police ne craignait plus d'affronter ni ces gangs ultra-violents qui régentent une bonne part des favelas (voir excellent reportage, là), ni les milices chargées de les combattre, mais qui sont très souvent, elles aussi, très corrompues.
"Les premières milices naissent à la fin des années 1970. Elles regroupent des policiers d'active en quête d'un complément de salaire, des flics tombés en disgrâce, des pompiers, des gardiens de prison et des "gros bras" prêts aux basses oeuvres", expliquait récemment Jean-Pierre Langellier, correspondant du Monde à Rio, dans Thriller anticorruption. "Recrutés par des petits commerçants que les trafiquants spolient, ils travaillent à la tâche. Ils intimident, neutralisent ou règlent leur compte aux "narcos", moyennant une prime. Le gouvernement de l'Etat de Rio fermera très longtemps les yeux devant ces pratiques illégales "d'autodéfense communautaire", qu'il tient pour un moindre mal. Il croit gagner sur les deux tableaux, en se dispensant d'augmenter la solde des policiers tout en les laissant "nettoyer" certains quartiers. Au fil des ans, le remède se révèle aussi dangereux que le mal. Les milices se transforment en mafias, les justiciers se font escrocs. Pour prix de leur prétendue protection contre les bandits, ils imposent une "taxe mensuelle de sécurité" à un nombre accru de victimes. Soit par l'extorsion pure et simple, soit par le chantage ou la menace. Ils poursuivent le même - double - objectif que les trafiquants : le pouvoir et l'argent. Dans les favelas, "l'économie des milices" devient tentaculaire. Ces dernières facturent au prix fort l'accès à la télévision par câble avec du matériel volé, la livraison de marchandises à la population ou les indispensables bouteilles de gaz dont elles contrôlent la fabrication clandestine. Elles imposent une commission sur les transactions foncières et immobilières. La boucle est bouclée lorsque certaines perçoivent une dîme sur les bénéfices des trafiquants qu'elles sont censées combattre."Moi ce qui m'intéresse, comme à chaque fois que je suis en Amérique centrale ou du sud, c'est bien évidement de savoir comment on regarde ces favelas, quelque soit le nom qu'elles portent selon le pays.
Si on part du principe que demain - c'est à dire en 2030 - nous serons plus de 8 milliards sur terre, dont 4 milliards de pauvres, qui pour la moitié vivront dans un bidonville, on ne peut qu'être marqué par la faiblesse des études et des travaux qui concerne l'économie de ces zones urbaines en pleine expansion.
Si, parallèlement, on sait que l'économie liée à la drogue est en très très forte progression, notamment dans les pays encore largement dominés par l'économie informelle, on comprend que la situation actuelle de Rio avec son cocktail "favelas + narcos" est sans doute une figure incontournable des villes du futur. Et pas seulement dans les pays pauvres.
Et pourtant, curieusement, on continue à faire comme si tout cela était anecdotique et exotique, ce qui est probablement une grosse erreur.
Voir sur ce sujet Vers des narcos cities ?, mais aussi, et plus spécialement sur la situation au Brésil, Paraisopolis.
Voir aussi, là.
Friday, December 17, 2010
CARS : ONE NEW TOYS STORY ?
Dans la lignée de mes récents posts Peut-on penser la voiture sans les jeux vidéo ? et Jeep/Meccano, quand les codes s'inversent, sur le rôle du ludique dans la façon de penser la voiture du futur, je me suis demandé dans quel lieu je pourrai aujourd'hui trouver une concrétisation de ce rapprochement entre le monde des jouets et celui de l'automobile ?
Ma première pensée a été pour le superbe Mint (Moment of Imagination and Nostalgia with Toys) Museum of Toys ouvert en 2006 à Singapour, et qui fait parti de mon parcours traditionnel dès que je vais dans cette ville, tant la collection de vieux jouets est superbe et surtout beaucoup mieux mise en scène que, par exemple, au Tin Toys Museum de Yokohama.
Mais je pense que mon plus gros choc en la matière fut, il y a quelques années, la visite du The Bruce Weiner Microcar Museum, situé à Madison en Georgie.
Ce lieu est magique tant la collection présentée est riche, notamment de modèles très peu connus, car "focused on Microcars in the late 1940's- pre-1964 range with Engine sizes of 700cc or less (many are 250cc and 50cc) and 2 doors or less". On a véritablement l'impression de se promener dans un grand magasin de jouets. Pour ceux que cela intéresse, cliquez là, vous trouverez l'index de l'ensemble des modèles, et une fiche technique pour chacun d'eux. C'est une vraie mine d'infos et d'images.
Si on part du principe que la voiture du futur sera plus compacte et plus ludique, pourquoi ne pas faire l'hypothèse que c'est dans ce musée que se dessine une partie de notre futur mobile ? Éléments de réponse, là ou là.
Et comme pour confirmer que certains modèles sont de façon assez naturelle assimilés à des jouets, je voulais vous proposer, ci-dessous, ce travail du plasticien Lorenzo Quinn. Quand vous saurez que le nom de cette sculpture est Vroom Vroom, vous comprendrez que je n'ai rien à ajouter !
Sur ce sujet de la mobilité ludique, voir aussi là et là.
Ma première pensée a été pour le superbe Mint (Moment of Imagination and Nostalgia with Toys) Museum of Toys ouvert en 2006 à Singapour, et qui fait parti de mon parcours traditionnel dès que je vais dans cette ville, tant la collection de vieux jouets est superbe et surtout beaucoup mieux mise en scène que, par exemple, au Tin Toys Museum de Yokohama.
Mais je pense que mon plus gros choc en la matière fut, il y a quelques années, la visite du The Bruce Weiner Microcar Museum, situé à Madison en Georgie.
Ce lieu est magique tant la collection présentée est riche, notamment de modèles très peu connus, car "focused on Microcars in the late 1940's- pre-1964 range with Engine sizes of 700cc or less (many are 250cc and 50cc) and 2 doors or less". On a véritablement l'impression de se promener dans un grand magasin de jouets. Pour ceux que cela intéresse, cliquez là, vous trouverez l'index de l'ensemble des modèles, et une fiche technique pour chacun d'eux. C'est une vraie mine d'infos et d'images.
Si on part du principe que la voiture du futur sera plus compacte et plus ludique, pourquoi ne pas faire l'hypothèse que c'est dans ce musée que se dessine une partie de notre futur mobile ? Éléments de réponse, là ou là.
Et comme pour confirmer que certains modèles sont de façon assez naturelle assimilés à des jouets, je voulais vous proposer, ci-dessous, ce travail du plasticien Lorenzo Quinn. Quand vous saurez que le nom de cette sculpture est Vroom Vroom, vous comprendrez que je n'ai rien à ajouter !
Sur ce sujet de la mobilité ludique, voir aussi là et là.