"Les premières milices naissent à la fin des années 1970. Elles regroupent des policiers d'active en quête d'un complément de salaire, des flics tombés en disgrâce, des pompiers, des gardiens de prison et des "gros bras" prêts aux basses oeuvres", expliquait récemment Jean-Pierre Langellier, correspondant du Monde à Rio, dans Thriller anticorruption. "Recrutés par des petits commerçants que les trafiquants spolient, ils travaillent à la tâche. Ils intimident, neutralisent ou règlent leur compte aux "narcos", moyennant une prime. Le gouvernement de l'Etat de Rio fermera très longtemps les yeux devant ces pratiques illégales "d'autodéfense communautaire", qu'il tient pour un moindre mal. Il croit gagner sur les deux tableaux, en se dispensant d'augmenter la solde des policiers tout en les laissant "nettoyer" certains quartiers. Au fil des ans, le remède se révèle aussi dangereux que le mal. Les milices se transforment en mafias, les justiciers se font escrocs. Pour prix de leur prétendue protection contre les bandits, ils imposent une "taxe mensuelle de sécurité" à un nombre accru de victimes. Soit par l'extorsion pure et simple, soit par le chantage ou la menace. Ils poursuivent le même - double - objectif que les trafiquants : le pouvoir et l'argent. Dans les favelas, "l'économie des milices" devient tentaculaire. Ces dernières facturent au prix fort l'accès à la télévision par câble avec du matériel volé, la livraison de marchandises à la population ou les indispensables bouteilles de gaz dont elles contrôlent la fabrication clandestine. Elles imposent une commission sur les transactions foncières et immobilières. La boucle est bouclée lorsque certaines perçoivent une dîme sur les bénéfices des trafiquants qu'elles sont censées combattre."Moi ce qui m'intéresse, comme à chaque fois que je suis en Amérique centrale ou du sud, c'est bien évidement de savoir comment on regarde ces favelas, quelque soit le nom qu'elles portent selon le pays.
Si on part du principe que demain - c'est à dire en 2030 - nous serons plus de 8 milliards sur terre, dont 4 milliards de pauvres, qui pour la moitié vivront dans un bidonville, on ne peut qu'être marqué par la faiblesse des études et des travaux qui concerne l'économie de ces zones urbaines en pleine expansion.
Si, parallèlement, on sait que l'économie liée à la drogue est en très très forte progression, notamment dans les pays encore largement dominés par l'économie informelle, on comprend que la situation actuelle de Rio avec son cocktail "favelas + narcos" est sans doute une figure incontournable des villes du futur. Et pas seulement dans les pays pauvres.
Et pourtant, curieusement, on continue à faire comme si tout cela était anecdotique et exotique, ce qui est probablement une grosse erreur.
Voir sur ce sujet Vers des narcos cities ?, mais aussi, et plus spécialement sur la situation au Brésil, Paraisopolis.
Voir aussi, là.