Saturday, February 23, 2008

ET SI LES NUCLEOCRATES JOUAIENT ENFIN AUX JEUX VIDÉO ?






Les images ci-dessus sont extraites d'un jeu vidéo appelé S.T.A.L.K.E.R. - Shadow Of Chernobyl, dont le titre dit assez bien où se déroule l'action et dans quel contexte. C'est pas forcément le jeu le plus drôle qui soit, mais il a au moins un mérite, celui de vous permettre de visiter la zone qui entoure la fameuse centrale Lénine qui a explosé le 26 avril 1986, et qui est aujourd'hui toujours strictement interdite. L'action du "jeu" se déroulant en 2012, on voit que les concepteurs n'ont pas forcément misé sur une amélioration très rapide de la situation des villes alentours.

Bref vous aurez compris que nous sommes dans l'univers d'un accident post-nucléaire bien réel, et ce avec les conséquences sanitaires et écologiques que l'on connaît déjà aujourd'hui, mais aussi avec d'autres conséquences que nous découvriront peut-être dans les années qui viennent.

Alors pourquoi je vous raconte cela ? Parce que je viens de tomber sur un article du Monde qui nous annonce que les autorités nucléaires françaises via le CODIRPA (Comité directeur pour la gestion de la phase post-accidentelle d'une situation d'urgence radiologique) s'apprêtent à esquisser une " "doctrine" afin de se préparer à gérer les conséquences d'une catastrophe nucléaire sur son sol." (sic)

Et le journaliste de préciser que cette doctrine "témoigne d'un changement radical dans la façon dont les autorités envisagent l'aléa nucléaire. Pendant des décennies, elles se sont montrées obsédées par la sûreté, insistant sur les mécanismes de défense et des statistiques rassurantes, l'accident n'ayant qu'une chance sur un million d'advenir, assurait-on fréquemment. Elles se placent désormais dans la perspective où il surviendrait bel et bien, avec des conséquences environnementales et sanitaires de moyen et long terme."

Oui, vous avez bien lu !!! 22 ans après Tchernobyl, aucune autorité française n'avait jusque là travaillé sur les conséquences à long terme d'un accident dans une centrale nucléaire !!! "Jusqu'à présent, les textes géraient la phase d'urgence d'un accident, jusqu'à la fin des rejets radioactifs, ce qui donne lieu à une dizaine d'exercices par an, témoigne Jean-Luc Lachaume, directeur général adjoint de l'ASN. Le post-accidentel, c'est explorer ce qui se passe ensuite : comment revenir à une situation vivable, si tant est qu'elle le soit, dans les zones touchées."

Quand un peu plus loin dans l'article, on apprend que la France travaille sur des scénarios d'accidents très soft par rapport à ce qui s'est passé en Ukraine, la surprise se double d'effarement. Non seulement, on a rien fait pendant deux décennies, et maintenant qu'on s'y met, on ne travaille que sur des hypothèses en deçà des vrais risques qui nous menacent.
Mais comme l'explique, pour le regretter, l'un des participants à ce groupe de travail, "il est dur d'appréhender le sacrifice d'un territoire pour plusieurs siècles, voire des millénaires".

No comment, si ce n'est pour vous rappeler notre Atelier du 23 mai prochain sur le thème "Et si on avait pas assez peur ?", avec Jean-Pierre DUPUY, auteur de "Pour un catastrophisme éclairé"
(voir )

PS / Et pour répondre à la question du titre : oui, il serait bien que les nucléocrates français jouent aux jeu vidéo. Ils y découvriraient d'autre visions et d'autres futurs possibles que ceux imaginés par leur certitude d'ingénieur.

PS 2 / Très bon reportage sur la zone de Techernobyl