Pour prolonger "Massacres hight-tech", quelques extraits du très bon "Main basse sur nos forêts".
"Les forêts ont subi, avec quelques années de retard, les mêmes dérives que l’agriculture productiviste. Elles se sont métamorphosées en champs d’arbres que l’on moissonne comme du blé, en monoculture avec un sol labouré, sous perfusion d’engrais et de produits phytosanitaires."
"La biodiversité, elle, s’appauvrit. Selon l’Inventaire forestier national, 51 % des forêts sont constituées d’une seule essence et 16 % de plus de deux essences. 80 % des arbres ont moins de 100 ans, soit à peine le stade de l’adolescence.
Les experts nous ont ânonné la même litanie. « Tout va pour le mieux, la forêt augmente. » Comme si couvrir une surface suffisait à résumer l’état d’une forêt, sa qualité et ses rôles écologiques."
"Sur les parcelles, on retrouve toujours les mêmes résineux : l’épicéa, le mélèze et évidemment le pin douglas.
C’est l’essence fétiche des industriels que l’on plante partout. L’arbre qui gâche la forêt.
Venu du nord-ouest de l’Amérique, le douglas aurait pu s’épanouir tranquillement dans les forêts primaires de l’Oregon où l’on peut voir des peuplements vieux de plusieurs siècles. Mais, on lui a préféré un autre destin. Coloniser les forêts d’Europe. Produire de « la ressource ligneuse » standardisée."
"Dans certains massifs, notamment dans le Limousin, neuf plants sur dix sont du douglas. Dans le Morvan, en grande partie aussi. Il a l’avantage de pousser droit comme une pointe d’arbalète.
Son bois est imputrescible et il croît vite, répondant à l’impatience des industriels. En trente-cinq ans, il atteint 40 centimètres de diamètre, la taille qui correspond aux machines et aux demandes des scieurs. En comparaison, un chêne demande cent vingt ans pour atteindre ce diamètre."
"On contracte le temps de l’arbre pour le plier aux normes du capital. On accélère le cycle. Un douglas est abattu à 35 ans alors qu’il ne devient mature qu’à 60-80 ans. « Jusqu’à cet âge, il pompe les minéraux dans le sol sans en restituer, c’est seulement après qu’il redonne à la terre ce qu’il a prélevé »"
On y reviendra, là.