

Tandis que l’ » Ideal-X » s’éloigne des quais de Newark, le représentant local de l’Association internationale des dockers, resté à terre, lâche aux journalistes présents : » Je donnerais cher pour que ce fils de chien coule à pic ! » Il est l’un des premiers à avoir compris l’ampleur des bouleversements que va provoquer le container, notamment sur la très remuante et très puissante population des dockers." - Extrait du très beau portrait de Malcom McLean, signé Tristan Gaston-Breton dans Les Echos du 31/07/07.





Ce genre de méga-bateau prend tout son sens quand on sait qu'aujourd'hui 90% du transport de fret est assuré par voie maritime.
La question est de savoir si l'explosion des échanges internationaux auxquels nous avons assisté depuis trente ans - notamment sous l'influence de la Chine - va se poursuivre, et notamment avec l'augmentation inéluctable du baril de pétrole ?
Rappelons, en effet, que le pétrole c'est 60% des coûts d'un voyage entre l'Asie et l'Europe. Le coût de l'énergie a donc un effet majeur sur celui du transport.
En 2000, quand le prix du baril de pétrole était de 20 dollars, acheminer un container de Shanghai à la côte Est des Etats-Unis coûtait 3.000 dollars.
Quand le baril atteint les 150 dollars, le coût du transport pour ce même container dépasse les 10.000 dollars, rappelaient récemment les chercheurs Jeff Rubin et Benjamin Tal du CIBC World Markets. Ces mêmes économistes estiment même que le doublement des coûts de transport de façon permanente ferait baisser des flux commerciaux de l'ordre de 45 %.
"Pour un pays comme la Chine, où la majorité des exportations manufacturières ont une valeur ajoutée réduite, une augmentation des coûts du transport conduit à une réduction massive des gains qu'elle peut extraire du commerce international" expliquait dès 2008, Hélène Rey, professeur à la London Business School.
Et là nous pourrions vivre une véritable révolution au niveau mondial, qui pourrait ressembler à une certaine démondialisation via une nouvelle régionalisation des échanges.
"Si le cours du pétrole se stabilise à des niveaux élevés, il y a donc fort à parier que la Chine arrêtera d'exporter certains produits vers les Etats-Unis et l'Europe", souligne H. Rey. "Déjà, il n'est plus rentable pour les entreprises chinoises d'exporter de l'acier vers les Etats-Unis : le fer australien importé comme matière première coûte trop cher et le transport vers les Etats-Unis est trop onéreux. Les aciéries américaines vont donc augmenter leur production. Le commerce va se régionaliser encore plus pour éviter les coûts de transport trop importants. Mexico, par exemple, va exporter plus vers le marché américain et la Chine moins. Les produits, tels que l'acier, à faible valeur ajoutée et difficiles à transporter en raison de leur masse, ne seront plus exportés sur de longues distances.
Les entreprises ne chercheront plus à se délocaliser vers des pays où la main-d'oeuvre est la moins chère mais vers des pays qui sont à la fois proches de leur marché à l'export et où la main-d'oeuvre est relativement peu coûteuse.
Avec la flambée des cours du pétrole, c'est comme si le monde s'agrandissait ou si la Terre devenait moins plate."
Si un tel scenario devait voir le jour, les grands bénéficiaires pourraient être autour de l'Europe des pays comme le Maroc ou la Tunisie qui profiteraient du recentrage méditerranéen, redonnant ainsi un nouveau sens et une nouvelle dimension aux analyses de Fernand Braudel.
Pour en revenir aux portes-containers, une des alternatives à leur survie pourrait être le retour de la marine la voile sur lequel certains parient … avec le soutien des Chinois - voir là.
Voir aussi, "toujours marin ?" et "hangar flottant".