



Architecture, Mobilité, Nomadisme, Urbanisme, Nouveaux Imaginaires urbains, Nouvelles Fictions, Prospective, Nouveaux imaginaires du corps, Nouveaux imaginaires du sport
"your life is your lifeLe spot, qui peut évidement être vu comme un véritable manifeste politique, fut interdit de télévision dès que débutèrent les émeutes en Angleterre, fin août.
don’t let it be clubbed into dank submission.
be on the watch.
there are ways out.
there is a light somewhere.
it may not be much light but
it beats the darkness.
be on the watch.
the gods will offer you chances.
know them.
take them.
you can’t beat death but
you can beat death in life, sometimes.
and the more often you learn to do it,
the more light there will be.
your life is your life.
know it while you have it.
you are marvelous
the gods wait to delight
in you."
"The objects of desire, whose absence is most violently resented, are nowadays many and varied – and their numbers, as well as the temptation to have them, grow by the day. And so grows the wrath, humiliation, spite and grudge aroused by not having them – as well as the urge to destroy what have you can’t. Looting shops and setting them on fire derive from the same impulsion and gratify the same longing.Extrait de "The London Riots – On Consumerism coming Home to Roost" - Zygmunt Bauman.
We are all consumers now, consumers first and foremost, consumers by right and by duty. The day after the 11/9 outrage George W. Bush, when calling Americans to get over the trauma and go back to normal, found no better words than “go back shopping”.
It is the level of our shopping activity and the ease with which we dispose of one object of consumption in order to replace it with a “new and improved” one which serves us as the prime measure of our social standing and the score in the life-success competition. To all problems we encounter on the road away from trouble and towards satisfaction we seek solutions in shops.
From cradle to coffin we are trained and drilled to treat shops as pharmacies filled with drugs to cure or at least mitigate all illnesses and afflictions of our lives and lives in common. Shops and shopping acquire thereby a fully and truly eschatological dimension. Supermarkets, as George Ritzer famously put it, are our temples; and so, I may add, the shopping lists are our breviaries, while strolls along the shopping malls become our pilgrimages. Buying on impulse and getting rid of possessions no longer sufficiently attractive in order to put more attractive ones in their place are our most enthusing emotions. The fullness of consumer enjoyment means fullness of life. I shop, therefore I am."
"Il est temps de s'interroger sur le sens profond et peut-être commun de ces émeutes qui éclatent aux quatre coins de la planète, au sein de pays et de régimes politiques radicalement différents et selon des modes de protestation semblables."
"Oui, nous vivons un période comparable à l’aurore de la paideia, après que les Grecs apprirent à écrire et démontrer ; comparable à la Renaissance qui vit naître l’impression et le règne du livre apparaître ; période incomparable pourtant, puisqu’en même temps que ces techniques mutent, le corps se métamorphose, changent la naissance et la mort, la souffrance et la guérison, l’être-au-monde lui-même, les métiers, l’espace et l’habitat.Ces quelques lignes sont de Michel Serres extraites d'un superbe texte généreux et intelligent sur les nécessaires nouvelles façons de devoir penser le monde. Le texte est titré "Petite poucette" et il est téléchargeable, là.
Face à ces mutations, sans doute convient-il d’inventer d’inimaginables nouveautés, hors les cadres désuets qui formatent encore nos conduites et nos projets.
Nos institutions luisent d’un éclat qui ressemble, aujourd’hui, à celui des constellations dont l’astrophysique nous apprit jadis qu’elles étaient mortes déjà depuis longtemps.
Pourquoi ces nouveautés ne sont-elles point advenues ? J’en accuse les philosophes, dont je suis, gens qui ont pour métier d’anticiper le savoir et les pratiques à venir, et qui ont, comme moi, ce me semble, failli à leur tâche.
Engagés dans la politique au jour le jour, ils ne virent pas venir le contemporain."
"(...) On a construit la Grande Bibliothèque au moment où l’on inventait Internet ! Ces grandes tours sur la Seine me font penser à l’observatoire qu’avaient fait construire les maharajahs à côté de Delhi, alors que Galilée, exactement à la même époque, mettait au point la lunette astronomique. Aujourd’hui, il n’y a que des singes dans l’observatoire indien. Un jour, il n’y aura plus que des singes à la Grande Bibliothèque. (...)
(...) Ce que l’on sait avec certitude, c’est que les nouvelles technologies n’activent pas les mêmes régions du cerveau que les livres. Il évolue, de la même façon qu’il avait révélé des capacités nouvelles lorsqu’on est passé de l’oral à l’écrit. Que foutaient nos neurones avant l’invention de l’écriture ? Les facultés cognitives et imaginatives ne sont pas stables chez l’homme, et c’est très intéressant. C’est en tout cas ma réponse aux vieux grognons qui accusent Petite Poucette de ne plus avoir de mémoire, ni d’esprit de synthèse. Ils jugent avec les facultés cognitives qui sont les leurs, sans admettre que le cerveau évolue physiquement. (...)
(...) La seule façon d’aborder les conséquences de tous ces changements, c’est de suspendre son jugement. Les idéalistes voient un progrès, les grognons, une catastrophe. Pour moi, ce n’est ni bien ni mal, ni un progrès ni une catastrophe, c’est la réalité et il faut faire avec. Mais nous, adultes, sommes responsables de l’être nouveau dont je parle, et si je devais le faire, le portrait que je tracerais des adultes ne serait pas flatteur. Petite Poucette, il faut lui accorder beaucoup de bienveillance, car elle entre dans l’ère de l’individu, seul au monde. Pour moi, la solitude est la photographie du monde moderne, pourtant surpeuplé."
(…) "Vers 18h30, tout le monde s’engouffrait lentement dans le minibus quand le M-Phone de Doris signala un flash d’actualités. « Attentats au port de Rotterdam. Douze morts, cinquante blessés, bilan provisoire.» Pendant que les autres changeaient de chaussures et demandaient au chauffeur de monter le volume du morceau de techno, Katrin effleura son M-Phone pour visionner le clip d’une minute vingt. Un long panache de fumée noire sortait d’une tour de contrôle éventrée par une explosion, et la légende indiquait «Botlek Center». Dans une autre séquence, deux supertankers, arrivés du Golfe après vingt-neuf jours de mer, gisaient coques retournées et presque coupées en deux, bloquant sur toute la largeur le canal noirci de pétrole et de débris calcinés. Le ciel délavé fourmillait d’hélicoptères et de câbles. " (…)
(…) " Sur CNN, une multitude de logos clignotaient, et le bandeau du bas de l’écran titrait: «Deux attentats à São Paulo: destruction des bâtiments du BM&F Bovespa et de trois héliports. » (…)
(…) Selon toute probabilité, la plate-forme informatique Mega Bolsa et le Global Trading System étaient anéantis. Quant aux héliports détruits, ils paralyseraient une partie du trafic de la ville, mais sans conséquences lourdes. Personne ne s’expliquait une telle faille dans la sécurité du pâté de maisons abritant la troisième Bourse mondiale. (…)
(…) Le lendemain matin, le réveil face aux 320 morts de Shanghai fit l’effet d’un serpent glissé sous ses draps. On avait cette fois visé trois des plus grands centres commerciaux de l’artère de Nanjing Road, haut lieu de la consommation chinoise. Les explosions s’étaient produites simultanément, en milieu d’après-midi. Le bilan était lourd, les blessés innombrables, des dizaines de personnes restaient disparues sous les décombres. On comptait plus de trente nationalités parmi les victimes, et chaque correspondant local dénombrait les siennes." (…)
(…) "La plupart des chaînes passaient sans discontinuer les images des trois attentats. (...) Pour s’y retrouver, une grande chaîne européenne avait conçu un logo pour chacun des attentats : la silhouette épurée d’un pétrolier brisé en deux pour Rotterdam, un tas de ruines surmonté de chiffres pour la Bourse de São Paulo et l’idéogramme signifiant Shanghai éclaté en trois morceaux." (…)
(…) "Après quelques tâtonnements, les journalistes anglophones, friands de formules de deux mots, se fixèrent médiocrement sur le terme de Big Three, trois attaques dans la même semaine, celles dont on n’avait pas besoin, disait-on pudiquement. Puis les médias inventèrent l’appellation qui s’est imposée depuis : Black February. La concomitance des attentats frappa l’économie de plein fouet, alors que s’achevait une grave crise de la finance chinoise qui avait miné la croissance américaine, et que la production pétrolière avait depuis longtemps atteint son plateau. Dans les jours qui suivirent, les premiers effets notables furent une chute de près de 60 % du trafic aérien, la pire du XXIe siècle."(…)
(…) "Le pétrole renchérissait comme jamais. Il devait à présent se cacher, être escorté, entouré des fastes dus à un souverain. Les flambées des années 1970 ou 2000 paraissaient dérisoires. Le baril avait atteint les 310 dollars et n’en démordait pas depuis près de six mois. Du fond de ses chambres d’hôtel, Katrin, fascinée, regardait les diagrammes clignotants des experts expliquant les lois de la formation des prix, soulignant que le monde avait basculé dans une ère inédite de récession. Elle voulait comprendre la valse des chiffres. La demande et la spéculation étaient telles que le marché spot menait la danse, transactions de gré à gré à court terme, contrebalancées par les pressions des États et les nationalisations de plusieurs grandes compagnies pétrolières." (…)
(…) "Le mouvement était devenu suspect. Les attentats avaient durci les lois antiterroristes, la plupart des moteurs thermiques, voitures et avions, restaient cloués au sol. (...) Les transports collectifs bénéficièrent du triple des crédits autrefois accordés à la route. On s’avisa que la plupart des emplois pouvaient en partie être exercés à domicile, que la semaine de quatre jours était idéale pour les enfants et l’équilibre personnel, puisqu’elle permettait d’économiser des millions de barils." (…)
(…) "Le long des ex-grands axes, les marginaux et les sourds repeignaient leurs crépis noircis, n’avaient plus à fermer les triples vitrages et à hurler sur les enfants qui jouaient au ballon sur le bitume ; partout, l’étalement urbain était gommé par les bulldozers, les banlieues lointaines remplacées par des jardins communautaires, des parcs, des forêts haut de gamme ; les villes se pelotonnaient, prises dans une force centripète; des pionniers de l’exode urbain aidaient à retaper de vieilles fermes auxquelles une quatre-voies avait autrefois ôté toute dignité; municipalités et agents immobiliers écumaient les terrains nouvellement constructibles, les immeubles soudain vivables, s’arrachaient les parcelles désormais agréables autour des aéroports ; avec des allures de princes, les sans-domicile défendaient contre la spéculation leurs taudis de chiffons et de journaux cimentés sous l’échangeur autoroutier; comme les touristes, les matières premières peinaient à voyager ; les mains des chauffeurs de poids lourds mollissaient dans leurs poches, des guichets leur parlaient de reconversion dans le tourisme vert, alors qu’ils s’étaient habitués à leurs familles perdues dans les plis de la carte, les accueillant en messies hebdomadaires, dispensés de sermons et de morale ; la nuit, les agriculteurs n’écoutaient plus la radio dans la cabine du tracteur diesel, et se contentaient d’égratigner lentement leurs champs pour des semis sans labour ; les éleveurs regardaient à nouveau dans les yeux les cochons déconcentrés et considéraient même les veaux bon marché qu’ils laissaient courir une heure par jour, par désœuvrement ; de loin en loin, des cratères et des carrières, des forêts écorchées de toutes parts témoignaient de la quête d’hydrocarbures, des sels et des pelles employés à faire dégorger l’écorce, à exhumer ces végétaux et animaux tombés au fond des océans." (…)
(…) "Le quotidien, la conversation, la pensée, la politique, les désirs humains étaient à ce point restés mouillés par le fun des hydrocarbures, le beat du global village, que dans les pays les plus gâtés, les plus douillets, États-Unis en tête, la pénurie eut des allures d’atteinte à la démocratie, de putsch des choses contre les hommes. Contraints de parler leur langue et de demeurer sur leur terre natale, la plupart s’estimaient assignés à résidence ; la mise en veilleuse des moteurs fut une arrestation générale, l’extinction des lumières la nuit, une veillée funèbre." (…)
(…) "Affolant les marchés, Black February avait été le catalyseur de toutes les raretés. Toujours moins d’énergies fossiles, d’eau pure et de métaux pour s’amuser et progresser. La panique, l’explosion des prix, la paralysie des véhicules imposèrent la pax rustica aux pays industrialisés, une paix qui faisait la joie des esthètes réactionnaires, des philanthropes avant-gardistes, des Cassandre de tous bords, d’écologistes pleins de rancœur, de tout ce qui vivait de symboles néo-testamentaires et de rhétorique moralisatrice.
Mais les foules démocratiques, hystériques, obsessionnelles, surinformées et velléitaires, tripes et sexes confits de vitesse, de plaisirs cosmopolites et de publicités, n’en finissaient pas de ressasser la fin de la récréation. Elles flétrissaient leurs dirigeants, leurs experts, reprochaient à leurs parents d’avoir osé leur léguer ce monde de frustrations, accusaient leurs enfants d’exister, de continuer à manger et respirer, se flagellaient elles-mêmes dans des tribunes indéfiniment recyclées, dans des auto-interviews télévisées, dans des séances de psychanalyse durable, et sur plus de blogs indignés qu’il n’y avait de vivants sur terre. Le pétrole leur infligeait le manque comme autrefois les jouissances, avec cette même brutalité de liquidateur, exauçant ou éradiquant les souhaits les plus profonds.
L’opinion publique était bien injuste, car on lui avait rendu service. Seul Black February, seuls ces grands communicants qu’étaient les terroristes avaient réalisé que l’humanité, irrévocablement cinéphile, s’était lassée de comprendre les menaces et demandait à vivre le film de la catastrophe." (…)
(...)Chose promise, chose due.
L’effondrement des écosystèmes, amorcé dans les années 1970, n’avait pas suffi – trop « cinéma muet ».
Les crues, les cyclones, les sécheresses et les pollutions étaient trop anonymes – trop «films d’auteur» –, même le spectaculaire déménagement du New York Stock Exchange au Garden State (New Jersey), suite aux inondations inquiétantes de Manhattan.
L’unanimité des experts, les extrapolations des courbes n’avaient pas davantage satisfait la pulsion scopique – trop « documentaires ».
Il avait fallu grimer les limites terrestres en agression d’origine humaine pour créer la transcendance nécessaire au grand sursaut, aux ruptures, aux privations. Il avait fallu ce coup de pouce afin que les Terriens prennent leur peur au sérieux et se mobilisent pour leur survie; qu’importent les menaces, ils avaient toujours besoin d’ennemis pour agir. Dans une douleur sans nom, hurlant de rage, ils revinrent sur terre et commencèrent à vivre selon leurs moyens." (…)
"Le pétrole est véritablement l’énergie qui a changé le monde, mais on l’occulte, on ne le voit plus du tout . Nous avons une dépendance quasi métaphysique au pétrole. Le monde est habitué à une unité de base qui est l’explosion, dans les moteurs, qui s’est répandue avec une densité phénoménale sur notre planète, comme odeur, comme bruit, comme puissance. On parle du nucléaire, mais il n’a pas créé une société à l’échelle mondiale, alors que le pétrole est un fait social mondial. Il est partout, ne serait-ce que dans cette pâte à modeler pour adultes qu’on appelle le plastique. Or comme beaucoup, j’ai le sentiment de la fin d’une époque, de la fin de la dépense énergétique à tout crin."Sur ce sujet de la fin du pétrole, voir l'excellent blog "Oil Man".