Cela fait plusieurs années que chez Transit-City, on essaie de réfléchir aux villes et à leurs mobilités en les abordant sous des angles un peu décalés.
Parmi ces angles, il y a :
- l’angle de la sportivité - voir "et si penser la mobilité sportive aidait à mieux penser la mobilité de demain ?"
Parfois ces deux champs se croisent et cela peut donner : « et si demain nous devions pratiquer la ville comme un sport ? »
C’est pour prolonger cette réflexion que notre partenaire Patrick Roult, chef du pôle haut niveau à l’Insep, s’est interrogé récemment sur la figure du pentathlon moderne et sur la façon dont celui-ci pourrait nous aider à penser la mobilité demain.
Pourquoi le Pentathlon moderne ? Car ce sport qui regroupe cinq épreuves - l’équitation, l’escrime, le tir, la natation et la course à pieds - a été crée par Pierre de Coubertin par référence à ce que devait pouvoir faire un soldat idéal à la fin du XIX° siècle.
La question posée par Patrick Roult est toute simple : si aujourd’hui on devait réinventer le pentathlon moderne, quelles seraient les épreuves qui devraient être retenues par référence à un soldat idéal du XXI° siècle ?
Sur ce nouveau mix d’épreuves, plusieurs remarques.
- Les remarques concernant directement les épreuves proposées
Comme le souligne Patrick Roult «le ministère français des sports, refuse pour le moment au crossfit, au parkour et au MMA une reconnaissance comme discipline sportive, de même ce n'est pas dans le giron du ministère des Sports que le eSport se structure en France, de fait ces 5 épreuves ne sont aujourd'hui pas considérées comme du sport !!
Et ce alors même que le Comité Olympique d'Asie vient d'annoncer qu'il y aurait des épreuves de d'eSport aux prochains "Asian Games" (voir, là) et que la Fédération Internationale de Gymnastique réfléchit sérieusement à introduire une épreuve de Parkour dans son programme de compétition des JO de Tokyo en 2020 (voir, là)"
Un manque de reconnaissance des pouvoirs publics français d'autant plus étonnant que ces pratiques "sportives" sont aujourd'hui très valorisées par un nouvel univers sportif en pleine croissance, celui des stages commandos d'inspiration militaire. Le phénomène apparu depuis une dizaine d'années aux Etats-Unis est, en effet, en pleine croissance actuellement en France, voir « Les Français en mode commando ».
Un peu comme si la suppression du service militaire et la hausse de la menace terroriste avaient incité les Français (mais pas qu'eux) à s'intéresser de nouveau à la chose militaire, mais avec des références totalement nouvelles, celle des troupes d'élites.
Un peu comme si la suppression du service militaire et la hausse de la menace terroriste avaient incité les Français (mais pas qu'eux) à s'intéresser de nouveau à la chose militaire, mais avec des références totalement nouvelles, celle des troupes d'élites.
- Les remarques concernant les nouvelles techniques militaires
Un imaginaire des troupes d’élites qui est en forte hausse depuis quelques années du fait de la nature des combats qui les met particulièrement en avant (voir, là) mais aussi au poids toujours plus important des jeux vidéo, et notamment de séries comme Call of Duty ou Ghost Recon qui déteignent sur la façon de penser le rôle du soldat.
Le sociologue spécialisé dans les jeux vidéo Laurent Trémel rappelait récemment « Il y a aujourd’hui une ludicisation de la chose guerrière. D’un côté, la population est coupée des réalités militaires en raison de la professionnalisation des armées, et de l’autre, on lui présente les forces spéciales et leur matériel high-tech comme quelque chose de sexy, désirable. C’est une façon de fabriquer un mouvement d’esthétisation de la guerre qui contribue à en faire oublier la réalité » A ce sujet, voir "2 jeux / 2 guerres / 2 corps / 2 villes".
Le sociologue spécialisé dans les jeux vidéo Laurent Trémel rappelait récemment « Il y a aujourd’hui une ludicisation de la chose guerrière. D’un côté, la population est coupée des réalités militaires en raison de la professionnalisation des armées, et de l’autre, on lui présente les forces spéciales et leur matériel high-tech comme quelque chose de sexy, désirable. C’est une façon de fabriquer un mouvement d’esthétisation de la guerre qui contribue à en faire oublier la réalité » A ce sujet, voir "2 jeux / 2 guerres / 2 corps / 2 villes".
- Les remarques concernent notre façon de penser la ville et ses mobilités
A travers ce pentathlon moderne pourrait ainsi se dessiner une nouvelle façon façon de penser la mobilité urbaine.
Avec le pentathlon réinventé par P. Roult, non seulement je me déplace sportivement car « je suis en forme et je veux le rester", mais je démultiplie mon champs d’action et de vision pour penser et vivre ma mobilité et ma ville autrement.
- Avec le drone, mon corps prend une autre dimension car il voit plus loin et autrement - voir, "le drone, nouvelle prothèse de l'homme connecté ?"
- Avec le virtuel, la rue prend une autre dimension car j’y vois des choses invisibles à l’oeil nu mais pourtant bien réelles - voir, "c'est quoi un piéton connecté demain ?"
A partir de là on peut se demander si les épreuves de ce pentathlon réinventé ne devraient pas se dérouler dans une ville, plutôt que dans une enceinte sportive.
La ville est devenue un terrain de course depuis le milieu des années 70 avec Nike (là), un terrain d’aventures extrêmes depuis le début des années 2000 avec Red Bull (là), il serait peut être temps qu’elle devienne le terrain de jeu d’une nouvelle mobilité sportive multi-facettes et multi-modes pensées autour de l’individu mobile connecté et en phase avec les nouvelles technologies (drone, jeux vidéo ...).
On retrouverait alors l’esprit d’origine du pentathlon - celui de un athlète complet capable de gérer toutes les techniques de la mobilité - et ainsi un nouveau terrain d'expérimentation pour penser la mobilité et la ville de demain.