Thursday, October 18, 2018

ET SI ON RELISAIT PATROLIN ?


Et si pour regarder nos fleuves et nos rivières un peu autrement, il fallait juste lire ou relire ce petit chef d'oeuvre qu'est "La traversée de la France à la nage" de Pierre Patrolin ?
"J’avais lancé en riant que je rentrais vers Paris à la nage, avant de plonger, résolu à me diriger vers l’amont, vers la boucle où la Meuse disparaissait dans un long virage. La rivière paraissait s’enfouir sous une pente de forêt, absorbée par le manteau de feuilles et de branches qui fermait l’horizon.
La vague levée au passage d’une péniche plus rapide suffit à tout masquer : je nageais sur le ventre, et cette houle m’entraîna. Emporté avec elle, je remontai aussitôt le courant sans effort, au rythme de son moteur. Dans la vapeur bourdonnante de ce moteur, un toussotement mat et régulier, entêtant, à la fois amorti par la surface de l’eau et réfléchi sur la cloison de forêt qui montait vers le ciel." (...)  
(...) " Le monde autour avait disparu. Nul moteur. Plus de pont, pas une construction, aucun ponton. Pas même un héron. Une masse d’eau brunâtre qui glisse sans rien qui puisse l’arrêter, ni ralentir son cours. La Meuse ne coule plus, elle glisse. Elle glisse comme une plaque, une plaque d’eau figée qui descend lentement sa vallée. Je nage sans bruit, attentif à chacun de mes mouvements. Je glisse aussi, en silence contre le courant, seul, sans téléphone, sans vouloir imaginer ce qui m’attend. Longtemps." 
(...) " Je nage sans effort, comme protégé par la tiédeur du coton humide qui épouse maintenant chaque mouvement de mon corps, dans une odeur de gaz froid, de carbone calciné et amer sur le côté de la rivière, seulement repoussé par le sillage des bateaux-mouches quand ils remontent le courant."

Et pour une autre vision romanesque, mais cette fois-ci américaine, des nageurs de rivières, voir "Il faudra que j'y aille à la nage, j'ai pas de voiture !"