Parfois vous vous prenez des bouquins en plein figure qui vous incitent à regarder le monde autrement. Ce fut mon cas il y a quelques années avec le passionnant "Maximum City" de Suketu Mehta, qui analysait avec une rare lucidité les réalités, parfois très sombres, de Mumbaï et de l'Inde contemporaine. On sortait enfin avec ce livre, de toutes les conneries que l'on peut entendre en Occident sur l'Inde pays non violent, tolérant et autres balivernes. (voir là, là et là).
Cette enquête obligeait aussi à se demander si Mumbaï ne pouvait pas devenir le laboratoire urbain d'un monde plus urbanisé, plus inégal, et de plus en plus dominé par le religieux - voir là.
Je viens de retrouver toutes ces questions en lisant le très étonnant - et très stimulant - "Instant City - Life and death in Karachi" de Steve Inskeep. Outre le décryptage des réalités pakistanaises et de leurs conséquences sur une ville comme Karachi, ce livre ne peut, en effet, qu'inciter à regarder le monde un peu autrement. Car tous les ingrédients décrits par Inskeep pour expliquer l'état de délabrement de la ville (corruption, islamisme radical, pouvoir militaire, terrorisme, pauvreté, illétrisme, ... ), ne sont malheureusement pas les seuls apanages du Pakistan. On les retrouve dans d'autres parties du monde, que ce soit au Moyen Orient, en Amérique latine, en Afrique ou en Asie (je vous laisse mettre les pays de votre choix).
Ce livre pose une nouvelle fois, mais avec un angle original et très peu abordé, la question de savoir comment regarder l'évolution de certaines villes qui n'ont a priori rien pour être des modèles et qui pourtant sont à elles seules les excellents reflets des nouvelles réalités urbaines mondiales - voir par exemple, "Dacca : our urban future ?" ou mon récent post sur Lagos.
Et pour continuer à réfléchir plus précisément sur cette question, je ne peux que vous inciter a lire ce très bon papier "Urbanity Now : Karachi as "Instant City"", paru dans The New Republic.