Thursday, December 11, 2025

ET SI C'ÉTAIT MARVEL QUI EXPLIQUAIT LE MIEUX LA DIFFÉRENCE ENTRE NIKE ET ADIDAS ?

Dans un récent post nous nous demandions "Et si Nike faisait du foot un univers fictionnel ?"

C'était le prolongement de "Et si Nike devenait un concurrent de Marvel ?"

Ces questions sont venues percuter une actualité que nous n'avions pas prévue, le lancement il y a quelques jours par Adidas de collections aux couleurs de Marvel avec le Réal de Madrid () et les All Blaks ().

C'est pour nous une occasion idéale de mettre en lumière une distinction stratégique fondamentale entre Nike et Adidas dans leur approche de la pop culture et de la construction narrative de leurs univers de marque. 


- Nike se positionne comme un producteur de fiction autonome, capable de générer son propre lore au sein même du sport. Comme l'illustre la collection "Hollywood Keepers", Nike ne vend en effet désormais plus seulement de la performance, mais une mythologie. La marque américaine a assimilé les codes des grandes franchises narratives (Marvel, Star Wars, Fortnite) pour transformer le sport en un multivers esthétique et culturel.


Adidas par sa collaboration avec Marvel, montre au contraire sa faiblesse - voir son incapacité - à générer son propre monde et donc son besoin de se greffer à un imaginaire préexistant. C'est le panthéon des super-héros du groupe Disney qui fournit le scénario, les personnages, et la structure mythologique (le bien contre le mal) nécessaires à Adidas.


Contrairement à Nike qui ambitionne d'être le créateur d'IP (Intellectual property), Adidas agit ici comme un utilisateur/licencié d'IP


Adidas achète un billet d'entrée pour le multivers, là où Nike construit les murs de son propre "parc thématique".


Nike prétend pouvoir être le nouveau Marvel du sport, tandis qu'Adidas choisit de s'associer au Marvel historique pour créer un monde commun.


En terme de marketing, ce n'est pas du tout la même chose à long terme.



Et si Adidas symbolisait le déclin d'une grande marque de sport ?

Wednesday, December 10, 2025

ÇA POURRAIT RESSEMBLER À QUOI LE MARKETING DE L'EFFONDREMENT ® ?

Dans notre précédent post nous évoquions l'idée que si les marques de sport s'emparaient des imaginaires de la guerre, "ce marketing de l'effondrement ® pourrait valoir des centaines de milliards demain".

Nous avions volontairement mis un ® à marketing de l'effondrement afin d'accentuer la tension paradoxale que contient cette expression qui vise à utiliser les outils du marketing pour accompagner ce qui a priori menace très directement ses finalités, à savoir la vente et la croissance de la consommation.

Une fois ceci dit, nous avons eu envie d'aller plus loin avec une question toute simple : 
Et si demain, une école de commerce délivrait un MBA Spécialisé en "Marketing de l'effondrement ®", quels seraient ses arguments pour vendre sa formation ?

Voilà ce que nous avons imaginé

Manuel pour écoles de commerce (MBA spécialisé)

"Comment transformer l'anxiété existentielle en croissance exponentielle à deux chiffres"

1. Le dernier marché vierge. L'effondrement est le seul territoire de consommation encore non saturé. Tous les autres besoins sont couverts. La peur de mourir ? Marché infini, indémodable, universel : 8 milliards de clients potentiels qui veulent tous survivre.

2. Une élasticité-prix maximale. Quand il s'agit de survie, le consommateur n'est plus sensible au prix. Un kit à 500€ ou 5000€ ? Quand c'est "ta vie ou ton portefeuille", le pricing devient émotionnel, non rationnel. Marges exceptionnelles garanties. Le luxe vendait du superflu cher ? Nous vendons du vital encore plus cher !

3. Une obsolescence accélérée par la menace. Chaque nouvelle catastrophe (canicule record, guerre, pandémie...) relance le cycle d'achat. Les clients upgradent naturellement leur préparation. Pas besoin de créer artificiellement l'obsolescence : l'actualité le fait pour vous. Modèle de revenus récurrents garanti par l'aggravation continue de la situation mondiale.

4. Une clientèle premium captive. Les CSP+ sont terrifiés mais ont les moyens. Ils paieront n'importe quoi pour sécuriser leur famille. Ce ne sont pas des achats impulsifs, ce sont des "investissements vitaux". Lifetime value client exceptionnelle : une fois entré dans la logique de préparation, il achète en continu.

5. La responsabilité individuelle = la poule aux oeufs d'or. En transférant la responsabilité de la résilience collective vers l'individu, on crée un marché par personne. Pas de mutualisation, pas de communs, que des solutions individuelles vendables. "C'est TON kit, TA survie, TA responsabilité (et TON achat)."

6. Un marketing sans responsabilité. Impossible de prouver que le produit ne marche pas avant qu'il soit trop tard (et là, plus de SAV possible !!). Zéro risque réputationnel. Si l'effondrement n'arrive pas : "heureusement qu'on était préparés". S'il arrive : les clients morts ne se plaignent pas. Business model rêvé : promesses invérifiables.

7. Un storytelling émotionnel très puissant. Les campagnes peuvent jouer sur : l'amour familial ("protège tes enfants"), la responsabilité paternelle/maternelle, la culpabilité ("et si tu n'avais rien fait ?"), l'héroïsme ("sois celui qui sauve sa famille"). Leviers émotionnels infiniment plus puissants que "achète une nouvelle voiture".

8. La peur = un très bon moteur d'achat. Le désir est capricieux, la peur est constante. Un client qui a peur achète impulsivement, immédiatement, sans comparaison concurrentielle. La peur court-circuite la rationalité. C'est du neuromarketing optimisé par l'instinct de survie. Taux de conversion exceptionnels.

9. Une légitimation par la science. Les rapports du GIEC, de l'ONU, de scientifiques font ta publicité gratuitement. Chaque nouveau rapport alarmiste est une campagne pub gratuite pour notre industrie. On n'a même pas besoin de convaincre que la menace existe, des institutions crédibles le font pour nous. On se contente de vendre les solutions.

10. Une segmentation infinie. Effondrement climatique, guerre nucléaire, pandémie, crise financière, cyberattaque, pénurie alimentaire, rupture énergétique... Chaque menace = une gamme de produits. Cross-selling et up-selling naturels : le client qui achète pour une menace veut aussi se protéger des autres. Panier moyen en croissance exponentielle.

11. Des communautés d'ultra-fidèles. Les preppers/survivalistes forment des communautés passionnées, évangélisatrices, qui font le marketing pour vous. Ils créent du contenu (YouTube, forums, réseaux sociaux...), organisent des événements, se forment mutuellement. Le contenu généré par ces ambassadeurs gratuits et très motivés est juste énorme.

12. Une premieumisation facilité. Facile de créer des gammes luxury : bunker design, kit de survie en cuir italien, cours de résilience avec coachs renommés... Les riches anxieux paieront 100 fois le prix pour du "haut de gamme apocalyptique". Le statut social peut se performer même dans la préparation à l'effondrement. Il faut imaginer créer le LVMH de la survie !

13. Un B2B gigantesque encore inexploité. Au-delà du B2C : les entreprises doivent préparer leurs "business continuity plans", les villes leurs plans de résilience, les États leurs stratégies d'adaptation. Contrats publics massifs. Le marché institutionnel est 100 fois plus gros que le marché consommateur et il est obligatoire (normes, régulations).

14. Un immense désir d'expertise. Devenir expert en résilience/effondrement confère un statut social nouveau. Les formations certifiantes, les diplômes, les consultants se multiplient. On peut vendre de la connaissance (immatériel et donc marges maximales) en plus des produits. L'effondrement crée une nouvelle classe d'experts ultra vendables.

15. Une prime au premier arrivée. Les marques qui s'installeront les premières sur "l'effondrement" auront un avantage de pionnier colossal. Dans 10 ans, quand ce sera mainstream, les late-comers ne pourront plus entrer. C'est LE moment de se positionner. First-mover advantage historique sur le dernier grand marché de l'humanité.

- Ce que les étudiants doivent bien comprendre : 

- Le marketing de l'effondrement n'est pas immoral, il est réaliste. 

- Si le monde s'effondre vraiment, autant que quelqu'un en profite. 

- Si le monde ne s'effondre pas, vous aurez vendu de la tranquillité d'esprit. C'est du win-win. 

- Cours complémentaires recommandés :

  • "Ethical washing de la catastrophe"
  • "Comment vendre la décroissance... sans décroître"
  • "Gamification de la survie"
  • "Influenceurs survivalistes : des partenariats stratégiques"


Caricatural ? Cynique ? Réaliste ?

On vous laisse juge.

Nous, en tout cas on s'est bien amusé à rédiger cet argumentaire en y mettant tout le bullshit marketing nécessaire. Et en imaginant même la couverture et une double page du livre qui serait fourni aux étudiants (images en haut).

On en reparlera le 18 mars prochain, .

Tuesday, December 09, 2025

ET SI DEMAIN, LES MARQUES DE SPORT FAISAIENT DE LA GUERRE DES UNIVERS FICTIONNELS ?

Ce post fait d'une certaine façon le lien entre notre précédente Rencontre :
et la prochaine :

Alors et si demain, les marques de sport faisaient de la guerre des univers fictionnels tout comme aujourd'hui Nike tente de faire du foot un univers fictionnel ?

Dit autrement : et si la guerre – comme fiction, comme esthétique, comme pratique physique – était le prochain grand territoire narratif à accaparer dans un monde saturé de menaces ?

On peut en tout cas faire l'exercice de l'imaginer.

- On peut imaginer qu'en 2032, Nike propose des "Military Solutions" qui ne seraient pas une gamme de produits, mais un système complet de préparation paramilitaire gamifié. 
Nike se positionnerait comme le fournisseur de l'entraînement nécessaire pour les défis réels du futur (crises climatiques, effondrement des infrastructures, isolement...). 
L'idéal sportif ne serait plus l'athlète de haut niveau, mais le citoyen préparé.

- On peut aussi imaginer qu'en 2035, Adidas crée "Neo-Sparta", une série de nouvelles épreuves entre groupuscules plus ou moins survivalistes, mais en milieu urbain. 
Adidas se concentrerait sur l'idée de la résilience collective et de l'autosuffisance, fusionnant la performance physique avec la gestion des ressources et le bien-être communautaire. 
C'est l'harmonie du groupe qui serait valoriser face à l’explosion des normes et des menaces.

- On peut toujours imaginer qu'en 2036, Salomon lance "Apex Citizen Trials », des supers UTMB agrémentés d’épreuves et d’exercices proches de ceux réalisés par les Groupement de commandos de montagne
Salomon utiliserait son expertise en sport outdoor pour créer des rites de passage modernes qui testent l'aptitude physique et mentale à naviguer et survivre en milieu hostile (y compris urbain dégradé). 
C'est le dépassement par la confrontation à un environnement de plus en plus hostile qui fonderait un nouveau récit de l'outdoor.


Ce qui rend ces scénarios stimulants pour la réflexion n'est pas leur caractère plus ou moins dystopique, mais bien leur puissance marketing. 

Car en fictionnalisant la guerre, les marques créeraient une consommation sportive radicalement nouvelle.

On n'achèterait plus un produit, mais une identité guerrière clairement identifiée. 

Un univers narratif où chacun aurait un rôle. 

Et un idéal qui donnerait un sens presque existentiel aux entrainements.

Le consommateur ne consommerait plus passivement, il s'engagerait totalement – physiquement, émotionnellement, voire tribalement. 

Parallèlement au client-sportif traditionnel, émergerait la figure du consommateur-combattant ou résistant.


Les marques ne vendraient plus de la performance ou du wellness, mais de la préparation

- Pas pour un marathon, mais pour face à l'effondrement. 

- Pas pour la santé, mais pour la survie. 

- Pas pour le plaisir, mais pour être prêt. 

Ca serait un nouveau récit de consommation beaucoup plus puissant que "sois en forme" ou "dépasse-toi". 


Dans cette économie de l'angoisse monétisée, chaque achat deviendrait un acte de préparation, chaque entraînement une assurance vie, chaque communauté de marque une tribu de survie potentielle.

Et c'est là que les univers fictionnels guerriers pourraient devenir très puissants sur le plan commercial : ils transforment l'anxiété collective en désir d'achat de réassurance. 

- Plus le monde est menaçant, plus tu as besoin du gear tactique de Salomon

- Plus les tensions montent, plus tu veux t'entraîner comme un Nike Operator

- Plus l'avenir est incertain, plus tu investis dans ton appartenance à la tribu Adidas Neo-Sparta

Les marques ne créent pas l'angoisse, mais elles la capteraient et la transformeraient en récits désirables, en esthétiques cool, en communautés rassurantes

Et ce marketing de l'effondrement ® pourrait valoir des centaines de milliards demain.

Imaginer la guerre comme univers fictionnel pour les marques n'est donc pas un délire, mais bien un avenir possible du sport... surtout si la fiction vend désormais mieux que la performance !!


On en reparlera le mercredi 18 mars 2026, .

Saturday, December 06, 2025

ET SI NIKE FAISAIT DU FOOT UN UNIVERS FICTIONNEL ?

Lorsque que nous avons annoncé que lors des Rencontres consacrées à la question "C'est quoi une marque de sport demain ?", nous allions entre autres nous demander "Et si Nike devenait un concurrent de Marvel et de Star Wars ?", on ne va pas vous cacher que cela a créé un certain désarroi chez beaucoup de nos interlocuteurs.

"Pourquoi et comment comparer Nike à Marvel ?" nous demandaient-ils.

Lors de ces Rencontres, le toujours très pertinent Paul Vacca a expliqué pourquoi cette comparaison était au contraire totalement évidente au vu de la façon dont les univers de marques se construisent aujourd'hui.

Et pour ceux qui en douteraient encore, Nike vient d'en apporter la meilleure démonstration en lançant sa collection "Hollywood Keepers", une pré-collection de maillots de gardien de but aux couleurs réinventées d'équipes nationales.

C'est très malin.

D'abord, parce qu'en lançant un maillot streetwear sans contrainte - les vrais maillots ne seront vendus qu'en 2026 -, Nike impose un style avant de se soumettre aux contraintes techniques de la compétition.

Ensuite, parce qu'en faisant des gardiens de but des héros, Nike a choisi le seul joueur qui a un maillot différent des autres et donc un excellent moyen de vendre toujours plus de références originales.

Enfin, parce qu'en lançant des maillots aux designs uniques avec des motifs culturels forts (tigres coréens, lions anglais...), Nike transforme les équipes nationales en plateformes culturelles.

En gros, Nike dit : "Le maillot n'est plus juste un uniforme sportif, c'est l'affirmation d'une nouvelle identité culturelle" qui n’a plus rien à voir avec les codes nationaux d’antan.

Et c'est là que ça devient très intéressant !


Le foot devient un univers fictif plus qu'un sport

- La performance s'efface devant la mythologie. Nike ne vend plus "le maillot que portent les champions" mais "l'univers dans lequel tu veux exister". Les gardiens "Hollywood" n'existent pas  - c'est une fiction nostalgique des grands goals des années 90. 

Nike crée des personnages, pas des athlètes.

- Le terrain disparaît comme le montre la chronologie : collection streetwear en décembre 2025, maillots de match "plus tard" en 2026. Le stade devient presque accessoire. Le vrai terrain, c'est Instagram, TikTok, la rue. 

Le match n'est plus qu'un prétexte narratif.

- Le foot comme franchise Marvel. Chaque équipe nationale devient un "univers" avec ses codes visuels, ses mythes. 

Nike transforme le football en multivers de marques. « Tu ne supportes plus une équipe, tu achètes un univers esthétique. »


Et pourquoi ça change tout.

- L'authenticité est inversée. Avant c'était : "C'est beau parce que c'est porté sur le terrain". Maintenant c'est : "C'est légitime sur le terrain parce que c'est déjà cool dans la rue"

- Le fan / supporter devient cosplayeur. Il ne porte plus le maillot pour ressembler à M'bappé. Il porte une pièce d'un univers fictionnel dont M'bappé est juste un player parmi d'autres.

- Le sport devient du lore, c'est à dire un ensemble d'histoires, de légendes et de mythes qui entourent un univers fictif. Cette notion du "lore" designer les univers fictionnels des jeux vidéo et de la fantasy

Ce qui compte désormais c'est l'histoire qu'on raconte, pas le score. 

Nike fabrique des légendes avant même qu'elles existent.

Avant, le foot créait ses légendes par les exploits.

Maintenant, Nike crée d'abord des légendes, et le foot suit. 


La vraie révolution

Le foot pour Nike demain, c'est Disney qui possèderait la NBA

Le sport réel n'est que la légitimation d'un empire de fiction. 

Les vrais concurrents de Nike ne sont plus les autres marques de sport - ce sont Netflix, Fortnite et tous les grands créateurs d'univers comme Star Wars et Marvel.

CQFD

Et ça peut être assez vertigineux quand on y pense : si la fantaisie vend mieux que la performance, pourquoi Nike aurait-il encore besoin... de vrais matchs ?

Friday, December 05, 2025

SOLDATS, SPORTIFS : LA MÊME ÉVOLUTION ?

Et si les soldats et les sportifs connaissaient les mêmes évolutions ?

Pour prolonger - avec exactement la même grille de lecture - la réflexion esquissée dans notre précédent post sur l'évolution de la figure du soldat entre le XX° et XXI° siècle.

- L'incarnation.


Le sportif du XX° siècle est un pur produit de l'ère des masses et de la standardisation olympique. Il marque la transition de l'amateurisme aristocratique aux grandes compétitions nationales télévisées. Son essor coïncide avec l'apogée du sport-spectacle et de la Guerre Froide, période où la performance sportive était un enjeu géopolitique. Ce sportif incarne l'athlète générique d'une nation, portant fièrement ses couleurs dans des disciplines codifiées.

Le sportif du XXI° siècle est un phénomène de l'ère digitale, né de la culture des réseaux sociaux, du personal branding et de la data. Il est paradoxalement le reflet d'une génération qui refuse les restrictions des fédérations traditionnelles et revendique l'authenticité, la personnalisation extrême de l'entraînement et la monétisation directe. Il veut avoir un contrôle total de ses données individuelles.


- Le modèle économique.


Le sportif du XX° siècle est le triomphe des fédérations nationales et du sponsoring de masse. Il appartient au marché du sport-spectacle et des grands contrats collectifs. Sa valeur économique individuelle est encadrée par des structures pyramidales, mais il représente une rentabilité basée sur l'audience télévisuelle massive et les revenus publicitaires. Il est l'exemple parfait du champion formaté pour le grand public.

Le sportif du XXI° siècle est le modèle de l'économie de plateforme et du revenu diversifié. Les réseaux sociaux, NFTs, contenus premium et partenariats directs transforment l'athlète en une marque personnelle dont la valeur ajoutée repose sur l'engagement communautaire, l'authenticité perçue et la rareté des accès VIP. L'investissement dans quelques athlètes ultra-médiatisés remplace le soutien diffus aux équipes nationales.


- Le mode opérationnel.


Le sportif du XX° siècle est un produit de l'ère des équipes nationales et de la compétition olympique, incarnant l'archétype du conflit sportif symétrique entre États-nations. Il est formé pour opérer au sein d'une structure fédérale rigide où la conformité aux normes, le respect du règlement et la subordination à l'entraîneur national sont primordiaux. Sa valeur réside dans sa capacité à exécuter un plan de jeu collectif standardisé et à contribuer au tableau des médailles de sa nation.

Le sportif du XXI° siècle est le produit de l'ère des compétitions hybrides, des sports émergents et de l'influence médiatique décentralisée. Il est de plus en plus un performer spécialisé et technologique, dont l'efficacité repose sur sa capacité d'auto-analyse biométrique et sa maîtrise des flux de données de performance. Sa valeur ajoutée n'est pas dans le conformisme, mais dans le niveau d'innovation individuelle, l'équipement personnalisé (capteurs, intelligence artificielle, coaching algorithmique) et la précision de la narration personnelle ciblée.


Thursday, December 04, 2025

PETITS SOLDATS / XX° SIÈCLE vs XXI° SIÈCLE

Quand on se demande "Et si demain, la guerre changeait le sport ?" comme nous le ferons lors des prochaines Rencontres de la Prospective Sportive ®, cela suppose a minima de s'interroger sur les évolutions des conflits et sur celles des militaires.


Cette réflexion peut se faire sous de multiples formes, celle notamment de prendre une figure iconique du combattant, comme le fameux petit soldat en plastique vert remis au gout du jour par Toy Story et Lego, et essayer de comprendre ce qu’il

symbolise dans la société - voir et .


Mais on peut aussi comparer cette figure avec un autre jouet, notamment celle du combattant Lego customisé par BrickArms et voir comment il peut nous aider à penser le combattant du XX° siècle vs celui du XXI°.


Tentons l’exercice.


- L'incarnation.


Le petit soldat en plastique vert est un pur produit du XX° siècle, de l'après-guerre et de l'âge d'or du plastique. Il marque la transition des soldats de plomb et de métal chers et très fragiles à celui de jouet bon marché. Son essor coïncide avec l'apogée de la culture de masse américaine et la Guerre Froide, période où l'imagerie militaire était omniprésente. Ce soldat incarne le G.I. Joe générique fantassin d’une « nation » indéfinie.


Le soldat Lego customisé BrickArms () est un phénomène du XXIe siècle, né de la culture de l'Internet, de la micro-entreprise et de la niche. Il est paradoxalement le reflet d'une génération post-Lego qui refuse les restrictions de l’entreprise danoise de vendre des armements réalistes modernes. Il répond à une demande de technicité individuelle.


- Le modèle économique.


Le petit soldat en plastique vert est le triomphe des économies d'échelle. Il appartient au marché du jouet de masse et du bas coût. Sa valeur économique est infime par unité, mais il représente une rentabilité basée sur le volume de production et la vente en vrac. Il est l'exemple parfait du produit jetable.


Le soldat Lego/BrickArms est le modèle de la micro-économie de niche et du produit premium. L'accessoire BrickArms transforme la figurine Lego en un objet de collection dont la valeur ajoutée repose sur le travail de design, la précision du moulage et la rareté relative. 


- Le mode opérationnel.


Le petit soldat en plastique est un produit de l'ère des armées de masse et de la guerre industrielle, incarnant l'archétype du conflit symétrique entre États-nations. Il est formé pour opérer au sein d'une structure hiérarchique rigide où la conformité et la substitution des unités sont fondamentales. Sa valeur réside dans sa capacité à exécuter des ordres standardisés et à contribuer au volume de feu ou à l'occupation du terrain. 


Le soldat Lego/BrickArms est le produit de l'ère des conflits asymétriques, des opérations spéciales et de la guerre de l'information. Il est de plus en plus un opérateur spécialisé et technologique, dont l'efficacité repose sur sa prise de décision individuelle et sa capacité à analyser des flux de données complexes. Sa valeur ajoutée n'est pas dans le volume, mais dans le niveau de compétence individuelle, l'équipement personnalisé (drones, communications chiffrées, capteurs) et la précision de l'intervention ciblée.


Question : cette grille de lecture est-elle applicable aux sportifs ?


On poursuit la réflexion dans de prochains posts.