Tuesday, October 14, 2025

QUAND NIKE DEVIENT UNE PLATEFORME ET SES PRODUITS DES PORTAILS NARRATIFS

Nike vient de confirmer qu'il s'apprêtait à changer de statut.

Dans les années qui vient, l'équipementier ne sera plus une marque de sport, mais une plateforme culturelle.

Et ses produits ne seront plus des produits, mais des portails narratifs

Cette mutation se concrétise de façon flagrante avec les partenariats que Nike vient d'annoncer avec les marques de mode plutôt pointues KNWLS et Windowsen, chargées toute deux de redonner une nouvelle jeunesse au modèle Air Max Muse.

Un produit unique, donc, - la Air Max Muse mais deux marques pour des cibles différentes et des histoires différentes :

KNWLS est chargée de cibler la consommatrice "chic-performante" qui valorise "la fonctionnalité, l'élégance transitoire et l'innovation technique appliquée à une esthétique high-fashion".

Windowsen est chargée, elle, de cibler la consommatrice "expérimentale/rebelle" qui valorise "l'art et l'expression radicale de soi".

Dans ses communiqués, Nike parle de "costume d'armure high-femme" pour KNWLS et d'"univers d'expression de soi ultramoderne" pour Windowsen

On ne parle plus de sport, mais juste de "mouvement" comme une forme de construction identitaire.


Avant Nike vendait des produits lié à un sport. 


Désormais, la marque vend des produits pour que chacun puisse se construire son identité !!!


Et ce n'est plus la marque qui va construire l'identité, mais l'acheteur !!!


On retrouve ce que nous posions au départ : Nike devient une plate forme culturelle qui offre des produits portails narratifs permettant à chacun de se construire son histoire. 


Nike a pompé la stratégie de Lego !


Et l'identité de Nike va donc changer une nouvelle fois


Elle va se déplacer de la qualité technique à l'expression culturelle.


Dit autrement.


En cinq décennies, le discours de Nike est passé de 

"Achetez Nike pour ce que vous pouvez faire.

à 

"Achetez Nike pour ce que nous savons faire."


Et aujourd'hui, le discours de Nike passe de 

"Achetez Nike parce que c'est de la bonne technologie

à 

"Achetez Nike parce que cette technologie 

vous donne le pouvoir d'être qui vous voulez être."


Avouez que c'est une toute autre histoire !!


Et que c'est passionnant à suivre.


On en reparlera bien évidemment longuement le 28 novembre prochainlors des Rencontres  "C'est quoi demain, une marque de sport ?"

Monday, October 13, 2025

LA MARQUE DE SPORT COMME PARTI IDÉAL ?

Faisons une fois encore une hypothèse pour essayer de réfléchir un peu différemment au monde du sport et plus particulièrement à l’évolution des marques de sport à plus ou moins long terme 

L'hypothèse est la suivante : et si dans un contexte de désaffection politique, d'individualisation de la sphère publique et de défiance envers les institutions, les individus étaient tentés de se regrouper autour de nouvelles entités disposant d’une identité forte, d’un récit cohérent et un cadre d'action concret  ?

Et si parmi ces entités qui offraient ces trois choses, on pouvait compter aujourd'hui un certain nombre de marques de sport ?

Dit autrement, et si demain les marques de sport contribuaient à construire une nouvelle catégorie politique que nous pourrions appeler le Parti idéal © ?

Alors ça serait quoi ce Parti idéal © ?

- Le Partis-idéal © ne s’occuperait pas des élections, et n'interviendrait jamais dans le débat politique classique.

- Le Partis-idéal © proposerait juste un mode de vie ou un manifeste existentiel dans lequel l'adhérent s'investirait corporellement et par son consommation, et ce uniquement pour son propre bénéfice.

- Le Parti idéal © serait ce qu'on pourrait appeler un parti identitaire post-idéologique

- Identitaire car il s'adresserait avant tout aux personnes cherchant à affirmer leur individualité à travers une ou des marques. 

- Post-idéologique au sens où il se positionnerait en dehors des segmentations politiques traditionnelles (gauche/droite, libéral/social...)

Il serait donc en phase avec le grand repli sur soi que l'on constate actuellement.

Certaines marques de sport sont déjà plus ou moins des partis idéaux


Avec leurs produits et leurs sagas publicitaires, les marques de sport offrent déjà à tout ceux qui ne se reconnaissent pas dans le jeu politique traditionnel, l’occasion de se construire une identité.


Elles offrent déjà l'occasion de voter avec son corps et sa carte de crédit. 


Acheter est pour beaucoup de personne aujourd'hui, un acte bien plus concret que le bulletin de vote.


Et si dans un monde de post-partis et de fin des grands récits, les marques de sport devenaient un nouvelle catégorie politique ?


Et si c'était aussi cela l'une des conséquences politiques d'une société d'individus obsédés par leur corps ?


On y reviendra le vendredi 28 novembre prochain lors de nos Rencontres organisées autour de la question « C’est quoi demain, une marque de sport ? »

Friday, October 10, 2025

FRANCHEMENT, QUI EST À LA HAUTEUR DE CETTE MUTATION POLITIQUE ?

En 2003 est paru aux Etats-Unis un passionnant bouquin signé de l'historienne Lizabeth Cohentitré «A Consumers' Republic: The Politics of Mass Consumption in Postwar America».


Ce livre analyse le moment où la société américaine s'est transformée après la seconde guerre mondiale, quand la consommation de masse fut élevée au rang d'idéologie nationale et de fondement de la citoyenneté. Cette nouvelle "république des consommateurs" promettait une démocratisation de l'abondance et une nouvelle égalité sociale. On connait la suite de l'histoire...


Question : Et si on remplaçait la voiture en couverture du livre de Lizabeth Cohen, par une paire de sneakers ?


Dit de façon plus concrète et claire ; et si aujourd’hui c’était l’obsession du corps qui devenait centrale pour analyser et penser une société ? 


On assiste actuellement à un glissement des valeurs et donc à ce que les sociologues appellent une redistribution du capital de consommation.


On est passé de l'extérieur (la maison, la voiture) à l'intérieur (le corps, la santé).


Le XXI° siècle est le siècle du corps.


Et ça change tout.


- Le corps est devenu l’objet de consommation centrale.


- Le corps est devenu le produit de consommation le plus visible et le plus intime


On est clairement passé de la richesse matérielle à la richesse corporelle.


L'individu est passé du "citoyen-automobiliste" décrit par L.Cohen, au citoyen "entrepreneur de soi".


Le sport est devenu un des grands marqueurs de notre nouvelle citoyenneté au sein de notre société d'individus.


Et les analyses de L. Cohen fonctionnent parfaitement pour analyser notre nouvelle situation.


On retrouve aujourd'hui la même et tout aussi fallacieuse promesse démocratique de la forme comme le nouvel égalisiteur social, alors que l’on sait tous que les inégalités corporelles (obésité, maladies chroniques) sont souvent l'expression visible des inégalités économiques.


Mais qui aujourd’hui accompagne et répond à cette mutation fondamentale de notre société ?


- Les politiques ? Non, évidemment ()


- Les dirigeants sportifs ? Non, malheureusement.


- Les marques de sport ? Oui, en très grande partie.


- Les groupes pharmaceutiques ? Oui, et encore plus demain.


Et c’est pour cela qu’il faut s’intéresser aux marques de sport et à celles qui se présenteront demain comme telles, et on pense plus particulièrement à celles du luxe () et à celle de la santé ().


Et c’est ce que nous ferons le 28 novembre prochain lors de nos Rencontres organisées autour de la question « C’est quoi demain, une marque de sport ? »


Ce n’est pas une question marketing.


Et encore moins une question de sport.


C’est juste et fondamentalement une question politique !

Tuesday, October 07, 2025

ET SI NIKE ET ADIDAS N'ÉTAIENT DÉJÀ PLUS DES MARQUES DE SPORT ?

En sortant de la très courte et très légère expo Virgil Abloh : The Codes, on s'est posé spontanément une question toute simple : et si Virgil Abloh devenait une vraie marque de sport ?

Pourquoi "vraie" ? Car Virgil Abloh est déjà une marque de sport par procuration, du fait notamment de son partenariat avec Nike.

Alors, ça serait quoi cette vraie marque ?

Ça serait sans doute une marque qui assumerait et célèbrerait l'inachevé et le travail en cours avec une esthétique do it your self


L'usage iconique des guillemets (ShoelacesAir...) serait omniprésent, non pas pour l'ironie, mais pour remettre en question le statut de l'objet sportif. 


Mais ça serait surtout une marque qui tenterait de rendre le luxe sportif immédiatement accessible. La marque ne ferait aucune distinction entre l'équipement de performance et la mode de rue. Les athlètes professionnels porteraient des tenues conçues pour être immédiatement adoptées comme streetwear de luxe après le match ou l'entraînement.


Les sorties seraient hyper-limitées et ciblées pour maintenir un désir intense, afin de transformer le moindre produit de la marque en objets de collection.


La marque ne chercherait donc surtout pas à inventer ou réinventer des technologies sportives, juste à les utiliser et à les recontextualiser esthétiquement.


Mais...


Comme un doute...


En effet, et si en cherchant à définir ce que pourrait être une marque de sport Virgil Abloh, on ne faisait en fait que décrire la démarche des grandes marques de sport ? C'est à dire un travail portant avant tout sur l'esthétique et la distinction. 

Et si définir aujourd'hui ce qu'est une marque de sport, devenait de plus en plus difficile - voir vain - du fait des frontières de plus en plus floues avec la mode et le luxe ?

Car aujourd'hui, les grandes marques de sport sont devenues des marques culturelles globales qui fabriquent du matériel sportif parmi d'autres produits, mais dont l'essence n'est plus seulement définie par le sport et la performance.


Le sport n'est déjà plus pour beaucoup d'entre elles qu'une source d'inspiration et un support narratif pour vendre avant tout un style de vie.


Et si donc, il fallait inverser notre question de départ et plutôt se demander : et si Nike et Adidas n'étaient déjà plus des marques de sport ?

Et si c’était le cas, comment pourrait-on dorénavant les qualifier ?

Voir : Et si Adidas abandonnait le sport ?

On en reparlera le 28 novembre, .

Friday, October 03, 2025

ET SI "SURPLACE ®" DEVENAIT UNE MARQUE DE SPORT ?

Quand on se pose la question de savoir si un jour la notion de Surplace pourrait devenir une marque de sport, on s’imagine au premier abord devoir réfléchir sur un territoire assez étroit.


Sauf que peu à peu, on découvre que c’est tout le contraire !


Car la notion de « surplace » est dans le sport - en réalité - une notion très large qui recouvre des activités presque antinomiques.


D’un côté, on a tous les sports axés sur la maitrise, l'équilibre et l'attente (ça va du cyclisme sur piste au dressage en équitation, en passant par le yoga).


Et de l’autre, tous les sports d’entraînement intense sans progression spatiale (tout ce qui est tapis, vélo et rameurs fixes).


Si cette marque devait exister, elle devrait donc refléter à la fois l'immobilité et le mouvement intense.


Pas évident.


La solution serait sans doute de se concentrer à la fois sur la technique (maitrise de l’immobilité) et sur la qualité de l'entraînement (maitrise de l’effort intense). 


Un positionnement oxymorique qui pourrait se synthétiser avec des slogans comme : 

    "Surplace ® - La maîtrise avant le mouvement."

    "Surplace ® - Entraînez l'équilibre, réussissez l'action."

    "Surplace ® - Le pouvoir de l'immobilité." 


Surplace ® se positionnerait ainsi comme la marque de l'athlète réfléchi, c’est à dire de celui qui sait que les bases et la technique sont les clés d'un succès à long terme. 


Elle pourrait presque devenir une marque du nouveau luxe.


Le luxe de la maîtrise personnelle, le luxe de la maitrise de son temps, le luxe de la maitrise des techniques et outils permettant se concentrer sur soi-même et l'amélioration de son corps.


Surplace ® pourrait alors prétendre incarner le nouveau mantra du luxe, "the Health is the new Wealth".


On en reparlera le 28 novembre, .